Peut-on abuser du démembrement ?
Les faits
Les faits de l’affaire portée devant le Comité pourraient se résumer comme suit :
- En 2000, une SCI IR acquiert un immeuble donné en location ;
- En 2005, une société IS est constituée par les mêmes associés que la SCI ;
- Suite à cette constitution, les associés apportent l’usufruit temporaire de la totalité des parts de la SCI IR à la société IS.
Les bénéfices escomptés
L’objectif du montage réside dans le cumul des avantages de la fiscalité IS (outre amortissement du droit d’usufruit temporaire au sein de la société IS) avec ceux de la fiscalité IR.
La fiscalité IS permet en effet une imposition moins lourde des résultats courants que la fiscalité IR. En revanche, la fiscalité IR est plus douce concernant l’imposition des plus-values de cession.
Le démembrement permet ainsi l’application de la fiscalité la plus avantageuse à chaque étape clef de la vie de la SCI tout en évitant les problématiques de cessation d’entreprise qui naîtraient d’un passage de l’IR à l’IS.
L’argumentation de l’administration
L’administration fiscale reprochait le but exclusivement fiscal de ce montage aux motifs que :
- La société IS ne disposait d’aucun compte bancaire ni d’aucune trésorerie ;
- Ses charges – essentiellement fiscales – étaient dans les faits acquittées par la SCI avant de se compenser avec le compte courant d’associé ouvert par la société IS en son sein (lequel était annuellement crédité par la quotepart de résultat lui revenant) ;
- Enfin, la société IS n’avait d’autre activité, depuis sa création, que la seule détention de l’usufruit temporaire des parts de la SCI.
L’avis conforme du Comité
Le Comité s’est rallié à la position de l’administration en retenant que l’interposition, par le biais du démembrement des parts sociales, d’une société IS dépourvue de toute substance économique n’avait pour seule finalité que de permettre l’imposition des résultats de la SCI à l’IS en application de l’article 238 bis K du CGI.
Ce faisant, le Comité en déduit que les associés de la SCI ont commis un abus de droit en détournant les textes de leur finalité en vue d’en retirer un gain fiscal artificiel.
La leçon à retenir :
Le Comité réitère sa position en mentionnant explicitement que l’option d’une société pour l’assujettissement de ses bénéfices à l’IS n’est, en soi, aucunement constitutif d’un abus de droit quand bien même le régime d’imposition correspondant est plus favorable au contribuable.
Divers montages similaires ont ainsi pu être mis en place sans pour autant encourir la censure de l’affaire étudiée, mais au prix d’ajustements indispensables car si le démembrement de propriété n’est par principe pas proscrit, y recourir maladroitement est en revanche systématiquement censuré.
Remarque opérationnelle :
Les montages mettant en œuvre des droits de propriété démembrés doivent donc être maniés avec précaution : fleuretant avec l’abus de droit fiscal, le recours à ces concepts ne peut se faire sans une expertise certaine en la matière sous peine de voir la globalité du montage remise en cause.