Investisseurs « Malraux », « Pinel », « Scellier », « Robien »…, votre logement est-il bien occupé à titre de résidence principale par votre locataire ?
Conclure un bail à usage de résidence principale n’est pas suffisant, il convient de vous assurer de l’usage effectif qui en est fait.
LA LOCATION EFFECTIVE A USAGE D’HABITATION PRINCIPALE DU LOCATAIRE : UNE APPRECIATION OBJECTIVE DU RESPECT DE CETTE CONDITION
Rappel de vos obligations
L’avantage fiscal, contrepartie de votre effort d’investissement, est subordonné à l’engagement de location nue à usage de résidence principale du locataire dont la durée varie en fonction du dispositif.
Cette location doit généralement prendre effet dans les douze mois (moins dans certains cas) qui suivent la date d’achèvement de l’immeuble.
Elle doit être effective et continue et doit dès lors être respectée non seulement au moment de la première location, mais également tout au long de la période d’engagement.
Précisions jurisprudentielles
Dans un arrêt rendu en date du 31 août 2017(1), la cour administrative d’appel de Lyon reprend l’interprétation du Conseil d’Etat(2) selon laquelle il convient d‘apprécier le respect de la condition de location à usage d’habitation principale du locataire de manière objective.
Peu-importe pour les juges que le propriétaire n’ait pas commis de faute ou de négligence, le simple fait que cette condition ne soit pas respectée suffit pour la remise en cause de l’avantage fiscal obtenu.
Bien que ces arrêts aient été rendus dans le cadre du dispositif de Robien, cette jurisprudence s’appliquerait certainement de la même manière aux dispositifs fiscaux « Malraux », « Pinel », « Scellier » …
BONNE FOI NE SUFFISANT PAS, QUE FAIRE ALORS POUR NE PAS SUBIR ?
S’assurer de l’occupation à titre de résidence principale par votre locataire
Le bénéfice des dispositifs fiscaux précités, ou a minima du dispositif de Robien, suppose donc un usage effectif de résidence principale par le locataire du bien tout au long de la location.
Dès lors, assurez-vous avant tout d’ériger le respect de cet usage en condition essentielle de votre bail. Insérez-y par exemple une clause spécifique prévoyant, compte tenu de vos obligations fiscales et sous peine de résiliation du bail et d’une demande de réparation,
- d’une part l’obligation pour le locataire d’en faire sa résidence principale,
- d’autre part celle de vous en attester annuellement et d’en justifier au moyen par exemple de sa déclaration d’impôt.
Cela vous permettra de pouvoir justifier de la résiliation pour remédier à la situation et potentiellement d’ouvrir droit à réparation.
Engager la résiliation du bail dans le cas contraire
Sous réserve que vous vous en ménagiez la preuve (témoignage du gardien ou de voisins, constat d’huissier…), le non-respect par votre locataire de son obligation d’user des locaux suivant la destination qui leur a été donnée par le bail, prive votre locataire du statut protecteur de la loi de 1989. La déchéance de son droit au maintien dans les lieux vous permettra ainsi d’engager la résiliation du bail sur le fondement des causes visées par le code civil (3).
En cas de redressement fiscal effectif, il a déjà été admis que les locataires, ayant entrainé par la violation délibérée de leur obligation d’occupation effective du logement, la rectification fiscale de leur bailleur, doivent réparation à ce dernier(4).
A noter
Ne sont pas concernés les investissements du type « déficits fonciers » de droit commun et « monument historique » pour lesquels la condition de résidence principale ne s’impose pas.
La notion précisée d’habitation principale
Depuis l’intervention de la loi ALUR du 24 mars 2014, l’article 2 de la loi de 1989 précise la notion, jusqu’alors interprétée de manière fluctuante par la jurisprudence, de résidence principale ; laquelle doit être entendue comme « le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé où cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation ».
A noter qu’en matière de dispositif Censi Bouvard, il a été jugé pour justifier de la remise en cause de l’avantage fiscal, que l’affectation de l’immeuble à usage de résidence avec services pour étudiants n’équivalait pas à son occupation effective par des étudiants (5).
(1) CAA Lyon, 31 août 2017, n°16LY00099,
(2) CE, 20 octobre 2016, n°390790,
(3) Civ.3ème, 21 mars 2007, n°0611843,
(4) CA Paris, 7 octobre 2014, n°13/01560
(5)CAA Nantes, 1ère, 28 sept. 2017, n° 15NT02565.