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Le Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Égalité des Territoires (SRADDET), un nouveau document d’urbanisme composite s’imposant aux SCoT et aux PLUi

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 relative à la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) est venue réanimer le schéma régional d’aménagement et de développement du territoire (SRADT) issu de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, tout en actualisant son potentiel normatif, pour accoucher d’un bloc composite de règles à l’articulation délicate :  le SRADDET (art. L.4251-1 et s. du code général des collectivités territoriales (CGCT) issus des art. 10 & 13 de la Loi NOTRe).

L’entrée en vigueur des premiers SRADDET fin 2019 / début 2020 interroge quant à la nature d’un tel document et à son impact normatif sur les autres documents d’urbanisme (SCoT, PLU, etc.).


I. UN OUTIL PERMETTANT A LA RÉGION D’EXPRIMER UNE STRATÉGIE GLOBALE

Un document majeur d’aménagement du territoire régional

Le SRADDET est un document régional dont les orientations s’imposent aux documents locaux de planification urbaine (SCoT, PLUi, PLU, POS, carte communale). 

Il vient ainsi renforcer la place de la région en ce qu’il lui permet de formuler sa vision politique des priorités en matière d’aménagement du territoire.

En Nouvelle-Aquitaine, le SRADDET a été adopté par le Conseil régional le 16 décembre 2019, avant d’être approuvé par la Préfet de région le 26 mars 2020, date de son entrée en vigueur.

Un document intégrant tous les schémas sectoriels pour mieux coordonner la mise en œuvre des politiques publiques

Le SRADDET intègre les orientations stratégiques définies à l’échelle régionale (cf. art. L.4251-1 CGCT).

En plus des éléments constitutifs hérités du SRADT, le SRADDET se substitue aux différents schémas spécifiques de la région, à savoir :

  • le schéma régional des infrastructures et des    transports (SRIT) ;
  • le schéma régional intermodalité (SRI) ;
  • le schéma régional climat air énergie (SRCAE) ;
  • le plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD).

Quant au schéma régional de cohérence écologique (SRCE) et à la trame verte et bleue,  ils peuvent être ajoutés de manière complémentaire au SRADDET sur délibération du Conseil régional.

II. DES ORIENTATIONS STRATÉGIQUES S’IMPOSANT AUX DOCUMENTS D’URBANISME INFÉRIEURS (SCOT, PLU) DANS UN RAPPORT DE PRISE EN COMPTE OU DE COMPATIBILITÉ

La fixation d’objectifs à atteindre par la mise en œuvre de règles générales 

Le SRADDET fixe, au minimum, 11 objectifs à  atteindre au sein d’un document d’objectifs en matière :
d’équilibre et d’égalité des territoires ;
d’implantation des différentes infrastructures d’intérêt régional ;
de désenclavement des territoires ruraux ;
habitat ;

  • de gestion économe de l’espace ;
  • d’intermodalité et de développement des transports ;
  • de maîtrise et de valorisation de l’énergie ;
  • de lutte contre le changement climatique ;
  • de pollution de l’air ;
  • de protection et de restauration de la biodiversité ;
  • de prévention et de gestion des déchets.

Ces objectifs sont traduits par des règles générales contenues dans le « fascicule » du SRADDET. 

Des normes qui s’imposent dans un rapport de prise en compte (objectifs) ou de compatibilité (règles générales) aux documents inférieurs

Les objectifs et les règles générales s’imposent, respectivement, dans un rapport de prise en compte et de compatibilité au SCoT ou, en son absence, aux PLU, PDU, PCAET ou encore aux chartes des parcs nationaux. 

Quelques précisions

Le SRADDET n’est pas une véritable innovation mais une adaptation aux régions du schéma directeur de la région Ile-de-France (SDRIF), ou encore du plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC). Toutefois, contrairement à ceux-ci, le SRADDET ne dispose pas de document graphique directement opposable aux documents inférieurs.

Le rapport de compatibilité est entendu comme une obligation de non contrariété aux orientations fondamentales fixées par la norme supérieure, dont la relative imprécision laisse aux autorités inférieures une certaine marge de manœuvre dans le choix des mesures à édicter. 

Le rapport de prise en compte est entendu comme l’obligation de compatibilité avec dérogation possible pour des motifs justifiés. 

L’article L. 4251-8 du CGCT prévoit que la substance prescriptive de ces règles peut être aménagée par une contrac-tualisation de la compétence ou encore des aides entre les EPCI et le Conseil régional.

Projet portant sur un ERP dit « coquille vide » : un risque d’illégalité pèse sur le permis de construire délivré.

La vigilance est de mise lors de la délivrance d’un permis de construire portant sur un établissement recevant du public (ERP) dont l’aménagement intérieur n’est pas connu à ce stade. Faisant une application stricte de l’article L. 425-3 du code de l’urbanisme,  le Conseil d’Etat juge que l’autorité compétente « ne peut légalement délivrer le permis sans mentionner expressément l’obligation de demander et d’obtenir une autorisation complémentaire avant l’ouverture au public ». Ce principe fait courir un double risque : sont illégaux, tout à la fois, le PC délivré de manière tacite sur un tel projet et l’arrêté de PC qui ne mentionnerait pas expressément l’obligation qui pèse sur le demandeur de recueillir l’autorisation prévue par l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation avant l’ouverture de l’ERP.

I. PERMIS DE CONSTRUIRE ET AUTORISATION DE TRAVAUX SUR UN ERP : UNE SIMPLIFICATION MANQUÉE

Autorisation de travaux sur un ERP et permis de construire : l’unicité de la demande


Dans une volonté de simplification des autorisations d’urbanisme, l’exécutif a souhaité, par une première ordonnance du 8 décembre 2005, que le permis de construire tienne lieu de l’autorisation prévue au titre de l’article L. 111-8 du CCH exigée pour les travaux d’aménagement des ERP, dès lors que le projet relève de son champ d’application (article L. 425-3 du code de l’urbanisme).

Prenant acte des difficultés pratiques rencontrées lorsque l’aménagement de l’ERP n’est pas connu lors du dépôt du permis de construire valant désormais autorisation unique, une seconde ordonnance du 22 décembre 2011 est venue préciser que la délivrance du permis de construire est possible, dans cette hypothèse, à condition que «  le permis de construire indique qu’une autorisation complémentaire au titre de l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation devra être demandée et obtenue en ce qui concerne l’aménagement intérieur du bâtiment ou de la partie de bâtiment concernée avant son ouverture au public ». 

L’échec du « deux-en-un » sur les ERP « coquilles vides »

La rédaction actuelle de l’article L. 425-3 du code de l’urbanisme permet de tirer la conclusion suivante : le PC autorise l’ERP mais ne vaut pas autorisation unique au titre de l’article L. 111-8 du CCH si l’aménagement de l’ERP sur lequel il porte n’est pas connu par le demandeur. Il faudra, dans ce cas de figure déposer une autorisation ultérieure auprès de l’autorité compétente pour les travaux relatifs à l’aménagement de l’ERP.

Le Conseil d’Etat a été saisi de cette question dans une affaire portant sur un permis de construire délivré en 2014 par la ville de Paris sur un ERP « coquille vide » qui ne mentionnait pas le dispositif précité malgré la présence du volet ERP dans le dossier. La Haute juridiction a appliqué littéralement l’article L. 425-3 du code de l’urbanisme. L’arrêté de PC doit, dans ce cas de figure, mentionner dans son dispositif (et non au rang des visas) « l’obligation de demander et d’obtenir une autorisation complémentaire avant l’ouverture au public » (CE, 23 mai 2018, req. n° 405937, Tab. Leb. ; ccl. Charles Touboul).

II. COMMENT SÉCURISER LES AUTORISATIONS D’URBANISME À CET ÉGARD ?


Intégrer au suivi de l’opération un rétro-planning du délai d’instruction du PC

Puisque l’arrêté de permis de construire doit expressément mentionner dans son dispositif « l’obligation de demander et d’obtenir une autorisation complémentaire avant l’ouverture au public », le permis de construire portant sur un ERP « coquille vide » ne peut être délivré de manière tacite, c’est-à-dire à défaut de notification de l’arrêté par l’autorité compétente à l’échéance du délai d’instruction. 

Les opérateurs gagneraient donc à prévoir un rétro-planning du délai d’instruction -qui est en principe de 5 mois pour une telle demande (art. R. 423-28 b) C. Urb.)- afin de solliciter, au plus tard 15 jours avant l’échéance du délai d’instruction, la prise d’un arrêté comportant la mention expresse requise au sein du dispositif. 

Attention ! Lorsqu’une demande de pièces complémentaires a été notifiée au demandeur, le délai d’instruction commence à courir à partir du moment où le dossier de PC intègre l’ensemble des éléments requis (art. R. 423-38 et R. 423-39 du C. Urb.), ce qui peut avoir pour effet de rallonger le rétro-planning fixé à compter de la date de dépôt de la demande de PC.

Solliciter un arrêté de PC rectificatif ou un PC modificatif

A l’aune de la jurisprudence commentée, le « Graal » que peut représenter l’arrêté de permis de construire est susceptible de se transformer en bombe à retardement en cas de contentieux. Hélas, l’arrêté de PC portant sur un ERP « coquille vide » omet parfois de mentionner « l’obligation de demander et d’obtenir une autorisation complémentaire avant l’ouverture au public ». Or cette omission rend le permis de construire illégal. 

Des solutions existent. Les conclusions de Charles Touboul, rapporteur public de l’arrêt du Conseil d’Etat (préc. CE, 23 mai 2018, req. n° 405937), indiquent clairement que « cette omission est régularisable », à la fois en application de l’arrêt SCI La Fontaine de Villiers (CE, 2 février 2004, req. n° 238315, Tab. Leb.) mais également, en cours d’instance, au titre de l’article L. 600-5-1 du C. Urb. 

Partant, dans une telle hypothèse, deux solutions se présentent au titulaire : 

  • solliciter un arrêté de PC rectificatif avant la fin du délai d’instruction ; 
  • déposer un PC modificatif ayant pour objet d’inscrire la mention requise dans l’arrêté.

Article L. 425-3 du code de l’urbanisme 


« Lorsque le projet porte sur un ERP, le permis de construire tient lieu de l’autorisation prévue par l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation dès lors que la décision a fait l’objet d’un accord de l’autorité administrative compétente qui peut imposer des prescriptions relatives à l’exploitation des bâtiments en application de l’article L. 123-2 du CCH. Le permis de construire mentionne ces prescriptions. Toutefois, lorsque l’aménagement intérieur d’un ERP ou d’une partie de celui-ci n’est pas connu lors du dépôt d’une demande de permis de construire, le permis de construire indique qu’une autorisation complémentaire au titre de l’article L. 111-8 du CCH devra être demandée et obtenue en ce qui concerne l’aménagement intérieur du bâtiment ou de la partie de bâtiment concernée avant son ouverture au public. »

Un permis de construire sur ERP « coquille vide » n’est pas exempté du volet ERP (PC39 et PC40)


Bien que l’aménagement intérieur de l’ERP ne soit pas connu par le demandeur du permis de construire, l’article R. 431-30 du C. Urb. reste applicable, de sorte que le permis de construire doit comporter les pièces spécifiques suivantes : 

  • pièces mentionnées aux articles R. 111-19-18 et R. 111-19-19 du CCH (PC39) ;
  • pièces mentionnées à l’article R. 123-22 du CCH (PC40).

Lexique


ERP : établissement recevant du public
PC : permis de construire
CCH : code de la construction et de l’habitation