En France, le secteur du bâtiment résidentiel et tertiaire représente 46 % de la consommation énergétique, constituant « un important gisement d’économies d’énergie 1». Dans la droite lignée de la stratégie nationale de réduction des consommations d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre, la loi « ELAN 2 », a créé le dispositif « Éco Énergie Tertiaire 3 » qui impose la réduction de la consommation d’énergie finale des bâtiments à usage tertiaire d’au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050, par rapport à une année de référence qui ne peut être antérieure à 2010. Ce nouveau dispositif renforce les obligations de réduction de la consommation d’énergie finale des bâtiments à usage tertiaire (I), tout en prévoyant des sanctions adaptées en cas de manquement à ces obligations (II).
I. DES OBLIGATIONS RENFORCÉES DE RÉDUCTION DE LA CONSOMMATION D’ÉNERGIE POUR LES BÂTIMENTS À USAGE TERTIAIRE
Un champ d’application restreint aux bâtiments à usage tertiaire
Renforçant les obligations relatives à la réduction de la consommation d’énergie, le dispositif « Éco Énergie Tertiaire » concerne les propriétaires ou preneurs à bail de :
- « tout bâtiment hébergeant exclusivement des activités tertiaires sur une surface de plancher supérieure ou égale à 1 000 m2 » ;
- « toute partie d’un bâtiment à usage mixte qui héberge des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2 » ;
- « tout ensemble de bâtiments situés sur une même unité foncière ou sur un même site dès lors que ces bâtiments hébergent des activités tertiaires sur une surface de plancher cumulée supérieure ou égale à 1 000 m2 ».
Des exceptions sont toutefois prévues pour :
- les constructions ayant donné lieu à un permis de construire à titre précaire ;
- les bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments destinés au culte ou dans lesquels est exercée une activité opérationnelle à des fins de défense, de sécurité civile ou de sûreté intérieure du territoire.
Les obligations résultant du dispositif « Éco Énergie Tertiaire »
La mise en œuvre de ce dispositif se traduit par l’atteinte de l’un ou l’autre des objectifs suivants :
- « soit un niveau de consommation d’énergie finale réduit, respectivement, de 40 %, 50 % et 60 % par rapport à une consommation énergétique de référence qui ne peut être antérieure à 2010 (valeur relative) » ;
- « soit un niveau de consommation d’énergie finale fixé en valeur absolue, en fonction de la consommation énergétique des bâtiments nouveaux de leur catégorie ».
A cet égard, les mesures de réduction doivent notamment porter sur la performance énergétique des bâtiments, l’installation d’équipements performants ainsi que leur dispositif de contrôle, leurs modalités d’exploitation, l’adaptation des locaux à un « usage économe en énergie » et le comportement des occupants de l’immeuble4.
Les contraintes existantes pour certains immeubles sont prises en compte puisque des modulations sont possibles notamment en cas de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales (par exemple, en cas de modifications importantes des façades en sites patrimoniaux remarquables)5.
II. UN CONTRÔLE STRICT SUR LA RÉDUCTION EFFECTIVE DE LA CONSOMMATION D’ÉNERGIE FINALE
L’obligation de déclaration annuelle des consommations énergétiques
Le dispositif prévoit que dès 2022, et annuellement, les consommations énergétiques de l’année précédente devront être déclarées au plus tard le 30 septembre via la plateforme OPERAT6, gérée par l’ADEME, qui présentera les données de consommation de manière anonymisée et permettra d’assurer un suivi annuel de la réduction de consommation d’énergie finale.
Report de la date d’échéance de déclaration des consommations énergétiques
Initialement, les consommations énergétiques5 des années 2020 et 2021 ainsi que l’année de référence choisie devaient être déclarées sur la plateforme OPERAT avant le 30 septembre 2022.
Toutefois, la date butoir a été repoussée au 31 décembre 2022 considérant que « cette année 2022 est une année d’apprentissage pour les assujettis » 7.
Une tolérance sera donc accordée jusqu’à la fin de l’année 2022 de sorte que de nouvelles déclarations et la modification des déclarations déjà réalisées pourront être effectuées. L’année de référence choisie pourra également être modifiée jusqu’en 2023.
Des sanctions adaptées à chaque obligation résultant du dispositif « Éco Énergie Tertiaire »
Le code de la construction et de l’habitation prévoit des sanctions adaptées8 à chaque manquement aux obligations prévues par le dispositif « Éco Énergie Tertiaire ».
En premier lieu, si les assujettis n’ont pas déclaré leur consommation énergétique avant le 31 décembre 2022, le préfet de département pourra les mettre en demeure d’effectuer cette déclaration dans un délai de 3 mois. A défaut, il sera procédé à la publication, sur un site internet des services de l’État, du document retraçant les mises en demeure restées sans effet9.
En deuxième lieu, en cas de non-respect de l’un des deux objectifs prévus, le préfet pourra mettre en demeure les assujettis d’établir un programme d’actions respectant leurs obligations, qu’il devra approuver. A défaut de transmission de ce plan dans un délai de 6 mois, le préfet pourra prononcer une deuxième mise en demeure, puis une amende administrative allant jusqu’à 1 500 € pour les personnes physiques et jusqu’à 7 500 € pour les personnes morales.
En troisième lieu, en cas de non-respect du programme d’actions approuvé par le préfet, celui-ci pourra réaliser un constat de carence et prononcer une amende administrative dans les mêmes conditions que celles susmentionnées.
Quelques précisions
1 Présentation du dispositif « Éco Énergie Tertiaire » sur le site de la préfecture de la Dordogne.
2 Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique.
3 Codifié à l’article L. 174-1 du code de la construction et de l’habitation.
4 Article R. 174-23 CCH.
5 Des modulations sont également possibles dans le cas d’un changement de l’activité exercée ou du volume de cette activité ainsi que dans le cas de coûts manifestement disproportionnés des actions par rapport aux avantages attendus en termes de consommation d’énergie finale (Art. L. 174-1 CCH).
6 Arrêté du 10 avril 2020 relatif aux obligations d’actions de réduction des consommations d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire.
5 Notons que « La consommation d’énergie liée à la recharge de tout véhicule électrique et hybride rechargeable est déduite de la consommation énergétique du bâtiment et n’entre pas dans la consommation de référence. »
7 Communiqué de presse du 22 septembre 2022, ministère de la Transition Écologique et ministère de la Transition Énergétique.
8 Article R. 185-2 CCH.
9 Principe du « Name and Shame ».
Point de vigilance : Les actions de réduction de la consommation énergétique ne peuvent conduire ni à une augmentation du recours aux énergies non renouvelables, ni à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre (art L. 174-1 CCH).
Abréviations
CCH : code de la construction et de l’habitation
OPERAT : Observatoire de la Performance Énergétique de la Rénovation et des Actions du Tertiaire
ADEME : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie