Le développement des installations de production d’énergies renouvelables pose régulièrement la question de la nécessité d’obtenir une dérogation à l’interdiction de destruction, de capture ou d’enlèvement, de perturbation intentionnelle des espèces protégées ainsi que de destruction, d’altération ou de dégradation de leurs habitats, visée à l’article L. 411-2, 4° du code de l’environnement. Son octroi est soumis à trois conditions parmi lesquelles figure la circonstance que le projet réponde à une raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM). Le décret n° 2023-1366 du 28 décembre 2023 pris pour l’application, sur le territoire métropolitain continental, de l’article L. 211-2-1 du code de l’énergie et de l’article 12 de la loi n° 2023-491 du 22 juin 2023, publié au Journal officiel n° 0303 du 30 décembre 2023, identifie les installations de production d’énergies renouvelables (I.) ainsi que les installations de production hydroélectrique (II.) qui sont réputées répondre à une telle définition.
I. Les installations de production d’énergies renouvelables bénéficiant de la RIIPM
Les seuils applicables aux installations de production d’électricité à partir d’énergie solaire
Les projets de production d’électricité à partir d’énergie solaire, implantés sur le territoire métropolitain continental, sont réputés répondre à une RIIPM lorsque deux conditions cumulatives sont remplies.
En premier lieu, la puissance de l’installation doit être supérieure au seuil fixé par le décret :
• en ce qui concerne une installation de production d’électricité d’origine photovoltaïque, la puissance prévisionnelle doit être supérieure ou égale à 2,5 MWc ;
• en ce qui concerne une installation de production d’énergie solaire thermique, la puissance prévisionnelle doit être supérieure ou égale à 2,5 MW .
En deuxième lieu, la puissance totale du parc raccordé au territoire métropolitain continental, à la date de demande de la dérogation, doit être inférieure à l’objectif maximal de puissance défini dans la PPE.
Les seuils applicables aux éoliennes terrestres et aux unités de méthanisation
Le décret n° 2023-1366 détermine également les conditions cumulatives applicables aux éoliennes terrestres et aux unités de méthanisation.
Outre la condition relative à la non-atteinte des objectifs maximaux de puissance sur le territoire métropolitain continental, au titre de la PPE, pour chaque type d’installation, les seuils applicables sont les suivants :
• la puissance prévisionnelle de l’installation de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent doit être supérieure ou égale à 9 MW.
Compte tenu de leur puissance, les projets éoliens offshore bénéficieront de la présomption de RIIPM.
• la puissance annuelle prévisionnelle de l’installation de production de biogaz à l’issue un processus de méthanisation doit être supérieure ou égale à
12 GWh/PCS/an.
II. Les installations de production hydroélectrique bénéficiant de la RIIPM
Les installations de production hydroélectrique concernées par la présomption de RIIPM
Le décret liste les deux types d’installations de production hydroélectriques susceptibles de répondre à une RIIPM, à savoir :
• les projets d’installations de production hydroélectrique gravitaire situées sur le territoire métropolitain continental ;
• les projets de stations de transfert d’énergie par pompage situées sur le territoire métropolitain continental.
Les installations hydroélectriques situées sur les cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux, sur lesquels aucune autorisation générant un nouvel obstacle à la continuité écologique ne peut être octroyée, sont expressément exclues du bénéficie de la présomption de RIIPM.
Les conditions cumulatives afin de bénéficier de la présomption de RIIPM
A l’instar des installations visées ci-dessus, deux conditions cumulatives sont requises pour qu’un projet d’installation de production hydroélectrique soit réputé répondre à une RIIPM, à savoir :
• la puissance prévisionnelle de l’installation doit être supérieure à 1 MW.
Initialement, le projet de décret fixait ce seuil à 3 MW. Les réserves exprimées par les syndicats et associations de professionnels du secteur ont convaincu les rédacteurs du décret d’abaisser ce seuil à 1 MW, permettant ainsi à des plus petits projets hydroélectriques de bénéficier de la présomption de RIIPM.
• la puissance totale du parc hydroélectrique raccordé au territoire métropolitain continental doit être inférieure à l’objectif maximal de puissance défini dans la PPE.
Quelques précisions
1. Le bénéfice de la présomption de RIIPM ne dispense pas les projets concernés de remplir les deux autres conditions cumulatives, non moins exigeantes, à savoir :
• l’absence de solution alternative satisfaisante ;
• le fait que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
2. Les syndicats et associations de professionnels du secteur ont exprimé des réserves quant aux seuils fixés par le décret, au motif que ceux-ci excluent les plus petits projets du bénéfice de la RIIPM.
Pour ces projets, il reviendra au pétitionnaire de justifier, dans sa demande de dérogation « espèces protégées », en quoi son installation répond à une RIIPM, notamment au regard de sa contribution à la lutte contre le réchauffement climatique et à la sécurité d’approvisionnement en énergie.
Or pour ces installations de puissances moins importantes, une telle démonstration pourra s’avérer délicate.
Abréviations
PPE : programmation pluriannuelle de l’énergie fixée par décret
RIIPM : raison impérative d’intérêt public majeur
SER : syndicat des énergies renouvelables
PCS : pouvoir calorifique supérieur