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Rapport « Rebsamen » : vers un système de décote plus avantageux pour les cessions de foncier public de l‘Etat ?

Ce mercredi 22 septembre 2021, la commission Rebsamen a remis au Premier Ministre le Tome 1 de son rapport visant à « étudier et objectiver les freins à la construction de logements du point de vue de la collectivité » 1. La commission a fait le constat d’une crise de l’offre de logements en France due à deux écueils : la dévalorisation de l’acte de construire et la rareté du foncier. Le rapport propose de favoriser l’accélération de la cession de foncier public en s’appuyant sur le dispositif de décote pour le logement social déjà existant. Ce système, reposant sur un ensemble de mesures volontaristes (I.A.), présente une efficacité relative selon le rapport Rebsamen (I.B.). La commission propose donc de se libérer de certains freins, notamment en compensant les recettes perdues par l’administration affectataire en raison de la décote (II.A.) et en informant plus efficacement les acteurs publics (II.B.)

I. LE CONSTAT DU RAPPORT REBSAMEN : LE DISPOSITIF ACTUEL DE DÉCOTE SUR LES CESSIONS DE FONCIER PUBLIC EST PEU EFFICACE

 

A. Des mesures volontaristes inscrites dans la loi…

Le rapport souligne les mesures prises ces dernières années permettant de favoriser la mobilisation de foncier public pour la production de logements, notamment sociaux. En premier lieu, la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a créé un dispositif de décote en ouvrant la possibilité de céder un bien du domaine privé de l’État à un prix inférieur à sa valeur vénale, à condition que celui-ci soit destiné à la réalisation de programmes de construction comportant essentiellement des logements, dont une partie au moins de logement social. La loi dite « Duflot » du 18 janvier 2013 a intégré ce dispositif à l’article L. 3211-7 du CG3P en l’élargissant aux établissements publics et en augmentant le plafond de la décote à 100%. Étonnamment, le rapport Rebsamen ne mentionne pas la loi « ELAN » du 23 novembre 2018 qui a pourtant encore élargi le dispositif en y intégrant les opérations comportant « majoritairement » des logements, soit 50% minimum, contre 75% auparavant, permettant ainsi à des programmes mixtes (commerce, bureaux…) de profiter de la décote.

B. …mais coûteuses pour l’Etat et peu efficaces

Malgré ces dispositions, le rapport Rebsamen fait le constat d’une efficacité relative de l‘application des décotes sur les cessions de foncier public en faveur du logement social. D’après la commission, ces décotes auraient coûté près de 220,9 millions d’euros à l’Etat depuis 2013. En dépit de cet effort et d’un bilan certes non négligeable, le rythme des cessions n’a pas augmenté. Le nombre de logements potentiels à construire sur les emprises cédées oscille toujours autour de 8.000 par an depuis 2013, loin des 22.000 estimés dans le projet de loi Duflot de 2013. En outre, selon un rapport de la Cour des comptes en date du 26 octobre 20172, le dispositif de décote a été relativement peu utilisé entre 2013 et 2016, jugé « trop complexe » et « peu efficient ».

Cette faible efficacité est d’autant plus dommageable que le potentiel de mobilisation du foncier public est important. Selon le rapport Rebsamen, en 2022 et sur les années qui suivent, les cessions pourraient permettre la production de 69.000 logements dont 17.000 sociaux.

II. LES PROPOSITIONS DU RAPPORT REBSAMEN : COMPENSER LES DÉCOTES ET MIEUX INFORMER LES ACTEURS

 

A. Proposition n° 1 : Mettre un terme à la perte de recettes subie par l’administration affectataire

La commission a constaté l’existence d’un frein majeur à l’utilisation du dispositif de décote : les administrations affectataires semblent l’appliquer avec parcimonie par peur de se priver de recettes nécessaires pour financer l’entretien de leur patrimoine immobilier. En effet, les recettes dégagées lors des cessions immobilières rejoignant le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’Etat », les affectataires peuvent craindre, après avoir consenti à des décotes, de manquer de ressources pour financer leurs opérations.

Pour pallier ce phénomène, la commission suggère de s’assurer que toute décote soit intégralement compensée pour l’administration affectataire. Deux scénarios sont proposés pour appliquer ce principe. Le 1er scénario consisterait à inscrire une ligne sur le budget du logement, dont la commission estime le montant à 30 à 50 millions d’euros. La 2nde approche serait l’intégration d’un mécanisme de péréquation au sein du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’Etat », de manière à répartir le coût global des décotes sur l’ensemble des affectataires.

B. Proposition n°2 : Introduire plus de transparence dans le dispositif d’application de la décote

D’autre part, la commission juge que le dispositif de décote est appliqué de manière « complexe   et peu transparente »3. Elle souligne notamment les nombreuses interrogations qui subsistent à son sujet chez les élus. Le point central d’incompréhension est la méthode de calcul de la décote, dite « par compte à rebours ». Celle-ci est bien appliquée en pratique mais reste méconnue, si bien que certains proposent de la remplacer… par elle-même ! Ainsi, afin d’assurer une meilleure transparence auprès de tous les acteurs, la commission propose d’inscrire dans la loi le détail de la méthode de calcul utilisée4.

Enfin, le rapport déplore les délais, jugés trop longs,  qui séparent l’identification d’une disponibilité de la cession effective d’un terrain. Pour faire en sorte de raccourcir ces délais, la commission propose d’améliorer la diffusion aux maires d’une information précoce. Celle-ci pourrait, selon la proposition n° 8 du rapport, prendre la forme d’une diffusion numérique obligatoire de l’inventaire actualisé « au fil de l’eau » des propriétés dont la cession est décidée ou à l’étude.

Qu’est-ce que la décote sur une cession de foncier public ?

Le dispositif de décote actuel, prévu par l’article L3211-7 du CG3P, prévoit que l’Etat ou un de ses établissements publics peut céder un terrain de son domaine privé pour un prix inférieur à sa valeur vénale lorsque celui-ci est majoritairement destiné à la construction de logements dont une partie au moins est réalisée en logement social.

Point de vigilance

Le rapport Rebsamen vise à proposer des éléments de réflexion au gouvernement. Il n’a pas de valeur juridique en tant que tel. Dans un discours du 28 septembre 2021 au Congrès HLM, le Premier Ministre a dégagé les grands axes des futures politiques inspirées de ce rapport. A ce jour, aucune annonce n’a été faite concernant le dispositif de décote sur les cessions de foncier public de l’Etat, et encore moins des collectivités territoriales.

Quelques précisions

1  Lettre de mission à la commission Rebsamen du Premier Ministre en date du 31 mai 2021, p.2

  Référé n°S2017-3068  de la Cour des Comptes en date du 26 octobre 2017 intitulé « évaluation du dispositif de la décote sur le foncier public en faveur du logement social »

3  Rapport « Rebsamen » pour la relance durable de la construction de logements, Tome 1, p.30

4  La commission souhaite voir modifié en ce sens l’alinéa 1 de l’article L. 3211-7 du CG3P.

La traduction du ZAN (zéro artificialisation nette) au sein de l’ensemble des documents de planification (SRADDET, SCoT et PLUi) : au plus tard en 2027 !

La loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » a été promulguée le 22 août 2021. Elle comporte notamment un titre V intitulé « se loger » dont les chapitres III et IV ont pour objet la « lutte contre l’artificialisation des sols » (cf. bulletin du 25 août 2021). Il ressort de l’article 194 de la loi, relatif aux conditions de transposition du principe du ZAN au sein des différents documents de planification stratégique (SRADDET, SCoT et PLU), que les échéances sont courtes et les sanctions sévères à l’encontre des retardataires.

I. LA TRADUCTION, AU SEIN DES SCOT ET PLUI, DE LA TRAJECTOIRE PERMETTANT D’ATTEINDRE LE « ZAN » EN 2050 DEVRA ÊTRE RÉALISÉE AVANT LES 22 AOÛT 2026 ET 2027


Une mutation des SRADDET attendue au plus tard au mois d’août 2023

Sauf à ce que le SRADDET traduise d’ores et déjà les principes de la loi « climat et résilience », à savoir la détermination d’une trajectoire pour atteindre le « ZAN » en 2050, en déclinant notamment l’objectif de réduction de la consommation des sols entre les différentes parties du territoire régional (cf. Art. L. 4251-1 du CGCT1), ce document devra faire l’objet d’une modification ou d’une révision pour y répondre.

Une telle procédure d’évolution du SRADDET devra être engagée avant le 22 août 2022 et approuvée avant le 22 août 2023.

La loi dite « climat et résilience » fait donc du SRADDET le document régional « phare » auquel il revient de décliner les objectifs de réduction de l’artificialisation entre les différentes parties du territoire, en principe sur proposition de la « conférence des SCoT » 2.  

Le projet de SRADDET ne pourra être arrêté avant la transmission de la proposition issue de la « conférence SCoT » ou, faute de proposition, à compter du 22 avril 2022.

Sans consensus trouvé entre les autorités compétentes en matière de SCoT ou, en l’absence de SCoT, celles compétentes en matière de document d’urbanisme, il reviendra aux auteurs du SRADDET d’arbitrer.

Une mutation des SCoT / PLU et carte com.  attendue au plus tard en août 2026 et 2027

1. Si le SRADDET mute dans les délais impartis (soit, avant le 22 août 2023), les dispositions de la loi devront être obligatoirement traduites au sein : 

  • des SCoT, au plus tard le 22 août 2026 ;
  • des PLUi ou des cartes communales, au plus tard le 22 août 2027

Pour accélérer le processus, le législateur précise qu’une telle mutation des SCoT, PLUi et cartes communales peut être réalisée, par dérogation au code de l’urbanisme, via la procédure de modification dite simplifiée

Pour les procédures en cours à la date de promulgation de la loi, de telles évolutions seront intégrées aux procédures d’élaboration ou de révision :

  • des SCoT et de PLUi dès lors que le projet n’était pas arrêté à la date de promulgation de la loi ;
  • des cartes communales si l’arrêté d’ouverture de l’enquête publique n’était pas adopté à la date de promulgation de la loi 3.

2. Si le SRADDET n’est pas approuvé dans le délai imparti (à savoir le 22 août 2023), les SCoT,  PLUi et cartes communales devront transposer l’objectif de réduction, jusqu’à l’horizon 2032, de moitié de la consommation des espaces NAF par rapport à la consommation réelle observée sur les dix années précédant la promulgation de la loi.

II. LES SANCTIONS PRÉVUES PAR LA LOI FAUTE DE TRANSPOSITION DU « ZAN » DANS LES DÉLAIS FIXÉS

Retour au principe de l’urbanisation limitée en l’absence de SCoT révisé/modifié dans les délais

Si le SCoT modifié ou révisé n’est pas entré en vigueur avant le 22 août 2026 (cf. supra), un régime comparable au principe de l’urbanisation limitée sera réintroduit sur le territoire couvert.

Les ouvertures à l’urbanisation des secteurs définis à l’article L. 142-4 du code de l’urbanisme seront en effet suspendues, à savoir : 

  • les zones à urbaniser délimitées après le 1er juillet 2002 ainsi que les zones naturelles, agricoles ou forestières ;
  • les secteurs non constructibles des cartes communales ;
  • les secteurs situés en dehors des parties urbanisées des communes non couvertes par un document d’urbanisme.

Le gel des autorisations d’urbanisme en l’absence de mutation des PLU et cartes communales dans les délais

Si le PLUi ou la carte communale (modifié(e) ou révisé(e)) n’est pas entré(e) en vigueur avant le 22 août 2027 (cf. supra), aucune autorisation d’urbanisme ne pourra être délivrée dans une zone à urbaniser du PLU (zones 1AU ou 2AU) ou dans les secteurs de la carte communale où les constructions sont autorisées. 

Ces interdictions sont applicables jusqu’à ce que le PLU ou la carte communale révisé(e) ou modifié(e) soit approuvé(e) dans les conditions détaillées ci-avant. 

Quelques précisions

  • 1 Rôle du SRADDET – Art. L. 4251-1 du CGCT : « (…) En matière de lutte contre l’artificialisation des sols, ces objectifs sont traduits par une trajectoire permettant d’aboutir à l’absence de toute artificialisation nette des sols ainsi que, par tranches de dix années, par un objectif de réduction du rythme de l’artificialisation. Cet objectif est décliné entre les différentes parties du territoire régional ».
  • 2 En février 2022, une « conférence des SCoT » devra être organisée en présence de l’ensemble des établissements publics compétents en matière de SCoT d’un même ressort régional ou, en l’absence de SCoT, de représentants des EPCI et des communes compétentes en matière de document d’urbanisme. De cette conférence doit émaner une proposition relative à l’établissement des objectifs régionaux en matière de réduction de l’artificialisation (fixation d’un objectif régional et, le cas échéant, déclinaison en objectifs infra-régionaux).
  • 3 Précision relative aux procédures SCoT / PLUi en cours : si la procédure d’élaboration ou de révision du SCoT / PLUi a été prescrite avant la promulgation de la loi et que le projet était déjà arrêté à cette même date, les mesures lui seront opposables immédiatement après son approbation.

Abréviations


CU : code de l’urbanisme
PLU : plan local d’urbanisme
Carte com. : carte communale
SCoT : schéma de cohérence territoriale
SRADDET : schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires
Espaces NAF : espaces naturels agricoles et forestiers

Réductions d’impôt Scellier, Duflot et Pinel 2020 : vérifiez vos avis d’impôt !

Il n’est possible de bénéficier de la réduction d’impôt que pour une seule opération par an en loi Scellier, et deux en loi Duflot et Pinel. A la suite d’un arrêt du Conseil d’Etat de 2018, la date d’appréciation du nombre d’investissements éligibles retenue auparavant par la doctrine a été modifiée (cf notre précédent bulletin à ce sujet) : ce n’est plus la date d’acquisition qui est retenue mais celle de l’achèvement. Cette modification de la doctrine a entrainé des plafonnements nouveaux dès l’imposition 2019 des revenus 2018 qui sont souvent passés inaperçus avec l’année blanche. Pourtant, ceux qui ont contesté ont obtenu gain de cause ! Le problème perdure pour l’imposition 2021 (revenus 2020). Regardez la colonne “réductions d’impôt” de votre avis d’imposition et comparez le montant indiqué dans la colonne “montant déclaré” avec la colonne “montant retenu”. En cas de différence, vous pouvez peut-être formuler une réclamation contentieuse !    

La doctrine administrative retenait la date d’acquisition du bien ou du dépôt du permis pour apprécier le nombre de logements éligibles

Plusieurs limitations s’appliquent aux réductions d’impôt « Scellier », « Duflot » et « Pinel ». D’une part, au titre d’une même année d’imposition et pour un même contribuable, la base de la réduction d’impôt, prix de revient du ou des logements confondus, ne peut excéder 300.000 €. D’autre part, le bénéfice de la réduction d’impôt sur le revenu est limité, au titre d’une même année d’imposition:

  • pour la réduction d’impôt « Scellier », à l’acquisition ou la construction d’un seul logement ;
  • pour les réductions d’impôt « Duflot » et « Pinel » à l’acquisition ou la construction de deux logements.

Pour apprécier la limite du nombre d’investissements éligibles, la doctrine administrative retenait la date de la signature de l’acte authentique d’achat du logement ou local, ou la date du dépôt de la demande de permis de construire pour les logements que le contribuable fait construire. Le fait générateur était et reste, quant à lui, l’année d’acquisition ou l’année d’achèvement des travaux si elle est postérieure. Jusqu’à présent, des contribuables ayant acquis deux biens pour lesquels le fait générateur de la réduction d’impôt intervenait la même année pouvaient néanmoins bénéficier de la réduction d’impôt au titre de chacun de ces biens sans limitation – s’ils avaient été acquis sur deux années distinctes.    

La doctrine administrative retient désormais le fait générateur de la réduction d’impôt pour apprécier le nombre de logements éligibles

Le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 18 juillet 2018 (n° 412142), a jugé que la limitation du nombre de logements pouvant bénéficier de la réduction d’impôt Scellier au titre d’une même année d’imposition s’apprécie au regard de l’année du fait générateur de la réduction d’impôt. L’administration fiscale a dû tirer les conséquences de cette décision et a modifié sa doctrine le 10 mai 2019 : dorénavant, pour apprécier la limite du nombre d’investissements éligibles, il convient de retenir la date du fait générateur et, par conséquent, la date d’achèvement du logement ou sa date d’acquisition si elle est postérieure. Concrètement, les contribuables qui avaient acquis des biens en VEFA au cours de deux années distinctes, mais achevés la même année, sont désormais soumis à la limitation suivante : un seul logement sera retenu pour la réduction d’impôt « Scellier » ou deux dans la limite de 300.000 € pour les réductions d’impôt « Duflot » et « Pinel ».    

Un plafonnement éventuellement contestable

Si vous avez bénéficié de réductions d’impôt Scellier, Duflot ou Pinel avant le changement de doctrine, seule la date d’acquisition ou la date de dépôt du permis de construire était prise en compte pour l’appréciation du plafonnement. Si vous avez acquis des biens au cours de deux années distinctes mais qu’ils se sont achevés la même année, votre réduction d’impôt a pu être plafonnée en 2019 et en 2020 alors qu’elle ne l’était pas auparavant ! D’autant que les formulaires de déclaration des revenus 2042  RICI ne permettent pas de préciser l’année d’acquisition pour les reports. Seule la date d’achèvement peut être déclarée. D’où la nécessité de vérifier vos avis d’impôt et d’étudier la possibilité de formuler une réclamation contentieuse en cas de plafonnement appliqué.  

La possibilité de réaliser une réclamation contentieuse

La doctrine antérieure permettait de bénéficier de la réduction d’impôt sans limitation concernant les biens acquis sur deux années distinctes. Cette doctrine peut, dans certaines hypothèses, être opposée à l’administration fiscale. L’enjeu est de préserver la totalité de votre réduction d’impôt au titre des revenus 2019 et 2020 concernant vos biens acquis sur deux années distinctes, mais également celle des années suivantes, la réduction d’impôt Pinel s’appliquant sur 6, 9 ou 12 années et les réductions d’impôt Scellier et Duflot sur 9 années.  

L’arrêt du Conseil d’Etat obère la sécurité juridique du contribuable

Le fait générateur de la réduction d’impôt désormais retenu pour apprécier ladite limitation place le contribuable dans une situation d’insécurité juridique, puisque la notion d’achèvement est extrinsèque à ce dernier. Le contribuable est donc placé dans une situation d’aléa concernant la limitation du nombre de logements éligibles.

Loi « climat et résilience » & énergies renouvelables : des toitures plus vertueuses…dès 2023

Promulguée le 24 août 2021, la loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » comporte de nombreux titres (consommation, production et travail, déplacements, logements, nourriture, protection judiciaire de l’environnement). Son titre III, « Produire et travailler », inclut un chapitre IV dont l’objet est de « favoriser les énergies renouvelables » (EnR). Participant à la nécessaire réponse collective aux enjeux climatiques dressés par le dernier rapport du GIEC du 9 août 2021 en faveur d’un changement de paradigme, la loi renforce l’obligation d’installer des systèmes de production d’EnR ou des toitures végétalisées sur certains types de bâtiments et leurs aires de stationnement (I.) et crée de nouvelles obligations pour certains parcs de stationnement (tendant notamment à une gestion économe des eaux pluviales), tout en prévoyant des possibilités d’exonération pour l’ensemble de ces dispositifs (II.).

I. L’EXTENSION DE L’OBLIGATION D’INSTALLER DES SYSTÈMES DE PRODUCTION D’ENR OU DES TOITURES VÉGÉTALISÉES SUR CERTAINS BÂTIMENTS ET LEURS AIRES DE STATIONNEMENT

L’abaissement du seuil d’application (500 m2 au lieu de 1 000 m2)

Afin d’atteindre les objectifs de la PPE sans consommer de foncier1, la loi renforce l’obligation d’installer des systèmes de production d’EnR – autrement dit principalement des panneaux photovoltaïques – ou des toitures végétalisées sur un mode cultural garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation tout en favorisant la préservation de la biodiversité.

Pour rappel, la loi énergie-climat du 8/11/2019 avait créé cette obligation pour les nouvelles constructions de plus de 1 000 m2 d’emprise au sol à usage commercial, industriel ou artisanal, les entrepôts ou les hangars non ouverts au public, ainsi que celles dédiées au stationnement public couvert, à hauteur de 30 % de la surface de la toiture ou des ombrières créées.

Désormais applicable dès 500 m2 d’emprise au sol2 pour ces mêmes constructions, cette obligation concerne également leurs extensions et rénovations lourdes qui génèrent une emprise au sol de plus de 500 m2.

Le nouveau dispositif précise discrètement que le système de végétalisation en toiture (s’il est choisi) devra ne recourir à l’eau potable qu’en complément des eaux de récupération.

Les bureaux également concernés (+ 1 000 m2)

La loi vient étendre le champ d’application de cette obligation aux constructions de bâtiments ou parties de bâtiment à usage de bureaux, lorsqu’elles créent plus de 1 000 m2 d’emprise au sol, et à leurs extensions et rénovations lourdes3 lorsque celles-ci génèrent une emprise au sol de plus de 1 000 m2.

Ces obligations – renforcées pour les constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, les entrepôts et les hangars non ouverts au public, et étendues aux constructions à usage de bureau – sont en outre applicables aux aires de stationnement associées à ces constructions lorsque ces aires font l’objet :

  • de rénovations lourdes3 ;
  • de la conclusion ou du renouvellement d’un contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial.

L’ensemble des dispositions mentionnées dans ce I., actuellement codifiées à l’article L. 111-18-1 du code de l’urbanisme, seront transférées dans un nouvel article L. 171-4 du CCH à compter du 1er juillet 2023, date d’entrée en vigueur du dispositif renforcé4.

II. DES CONTRAINTES COMPLÉTÉES PAR D’AUTRES OBLIGATIONS PESANT SUR CERTAINS PARCS DE STATIONNEMENT DE PLUS DE 500 M2, MAIS TEMPÉRÉES PAR DES POSSIBILITÉS D’EXONÉRATION ÉLARGIES POUR L’ENSEMBLE DES DISPOSITIFS ÉVOQUÉS

De nouvelles obligations concernant certains parcs de stationnement de + de 500 m2

La loi crée un nouvel article L. 111-19-1 dans le code de l’urbanisme imposant des contraintes – en vue notamment d’une gestion plus économe des eaux pluviales – sur les parcs de stationnement extérieurs de plus de 500 m2 associés aux constructions visées au futur article L. 171-4 du CCH, ainsi que pour les parcs de plus de 500 m2 ouverts au public.

Ceux-ci devront ainsi intégrer sur au moins 50% de leur surface :

  • des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales ou leur évaporation ;
  • des dispositifs végétalisés ou des ombrières concourant à leur ombrage, dès lors que l’un ou l’autre de ces dispositifs n’est pas incompatible avec la nature du projet ou du secteur d’implantation et ne porte pas atteinte à la préservation du patrimoine architectural ou paysager. Pour ce qui est des ombrières, elles devront en outre intégrer un procédé de production d’EnR sur la totalité de leur surface.

Ces dispositions s’appliqueront aux demandes d’autorisation d’urbanisme déposées à compter du 1er juillet 20235.

Des cas d’exonération élargis pour les trois dispositif

Les contraintes à venir engendrées par ces trois dispositifs exigeants, mais aussi plus coûteux, doivent être nuancées par l’ouverture des cas d’exonération prévus par la loi sur la base desquels l’autorité compétente en matière d’autorisation d’urbanisme pourra prévoir, par décision motivée, de ne pas soumettre le pétitionnaire aux obligations prévues par les dispositions des futurs articles L. 171-4 du CCH et L. 111-19-1 du code de l’urbanisme. 

Actuellement6, elle peut exonérer le porteur de projet si le dispositif prévu est de nature à aggraver un risque, ou encore lorsque l’installation présente une difficulté technique insurmontable ou qui ne peut être levée dans des conditions économiquement acceptables.

Lors de l’entrée en vigueur de la loi, une exonération pourra être mise en œuvre7 si :

  • des contraintes techniques, de sécurité, architecturales ou patrimoniales ne permettent pas l’installation du dispositif (aggravation d’un risque ou difficulté technique insurmontable) ;
  • ou si les travaux ne peuvent être réalisés dans des conditions économiquement acceptables.

 

Précisions

1 Cf. notre bulletin « ZAN » du 25/08/2021.

2 La loi vient ainsi déconnecter le régime de cette obligation du seuil de l’autorisation commerciale prévue à l’article L. 752-1 du code de commerce.

3 La détermination de la nature des travaux de rénovation lourde affectant les structures porteuses du bâtiment et les aires de stationnement – qu’un décret viendra opérer dans le délai d’un an – sera déterminante.

4 L’article L. 111-18-1 du code de l’urbanisme sera alors abrogé.

5 La loi précise qu’elles s’appliqueront en cas de conclusion d’un nouveau contrat de concession de service public, de prestation de service ou de bail commercial portant sur la gestion d’un parc de stationnement ou son renouvellement, à l’instar de celles prévues au futur article L. 171-4 du CCH.

6 Actuel article L. 111-18-1 du code de l’urbanisme.

7 Les critères permettant cette exonération seront précisés par décret dans un délai d’un an.

Point de vigilance : sauf à ce qu’il s’agisse d’une malfaçon du texte, la rédaction de l’article 101 de la loi laisse à penser que cette exonération pourrait s’appliquer de plein droit pour les opérations mentionnées à l’article L. 111-19-1 du CCH, ce que le décret précisera.

Abréviations

EnR : énergies renouvelables

PPE : programmation pluriannuelle de l’énergie

PV : photovoltaïque

ZAN : zéro artificialisation nette

CCH : code de la construction et de l’habitation

Zéro artificialisation nette (ZAN) du territoire français : exit l’objectif indéfini, place à la codification et à la programmation

La loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » a été promulguée le 24 août 2021. Elle comporte de nombreux titres (consommation, production et travail, déplacements, logements, nourriture, protection judiciaire de l’environnementet, pour ce qui nous intéresse, un titre V intitulé « se loger » dont les chapitres III et IV ont pour objet la « lutte contre l’artificialisation des sols ». Depuis notamment l’instruction au gouvernement du 29 juillet 2019 relative à l’engagement de l’Etat en faveur d’une gestion économe de l’espace – laquelle s’adressait aux services de l’Etat  afin qu’ils veillent «  à ce que la lutte contre l’artificialisation soit bien prise en compte dans les stratégies d’aménagement, lors de la définition des projets et lors de leur mise en œuvre » – les collectivités étaient très fortement incitées à réduire la consommation d’espace lors de l’élaboration ou la révision de leurs documents d’urbanisme. La simple incitation laisse désormais place à un cadre juridique structuré.

I. ZÉRO ARTIFICIALISATION NETTE DU TERRITOIRE : POURQUOI / COMMENT ?

Le ZAN : raisons et incidences

Selon l’étude d’impact du projet de loi, le phénomène d’artificialisation des sols « a des conséquences négatives à la fois parce qu’il crée une dépendance à la voiture individuelle, augmente les déplacements, éloigne des emplois et des services publics, mais aussi parce qu’il réduit les espaces naturels et agricoles et porte ainsi atteinte à la biodiversité, au potentiel de production agricole et de stockage de carbone, et augmente les risques naturels par ruissellement ».

En conséquence, la même étude d’impact estime que la lutte contre cette dynamique contribue à faire baisser les coûts relatifs aux réseaux et voiries, aux équipements publics et aux transports, de sorte qu’au-delà de son incidence positive sur l’environnement en général, elle est jugée comme ayant un impact positif sur la ville et son cadre de vie.

Toutefois, la lutte contre l’artificialisation des sols a pour effet une augmentation des coûts des opérations d’aménagement et immobilières (densification, rareté du foncier notamment) et est critiquée par les propriétaires fonciers qui se sentent parfois spoliés de leur propriété privée (terrains classés en zone inconstructibles).

Définition et programmation du ZAN

Bien qu’assez objectivable, la notion d’artificialisation des sols ne faisait pas l’objet d’une définition juridique. La loi ajoute à l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme les alinéas suivants :

« L’artificialisation est définie comme l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage.»

Un décret en Conseil d’Etat devrait également établir « une nomenclature des sols artificialisés ainsi que l’échelle à laquelle l’artificialisation des sols doit être appréciée dans les documents de planification et d’urbanisme ».

L’article 191 de la loi prévoit : « Afin d’atteindre l’objectif national d’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050, le rythme de l’artificialisation des sols dans les dix années suivant la promulgation de la présente loi doit être tel que, sur cette période, la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale soit inférieure à la moitié de celle observée sur les dix années précédant cette date. Ces objectifs sont appliqués de manière différenciée et territorialisée, dans les conditions fixées par la loi.».

II. LE ZAN EST MIS EN OEUVRE PAR LES DOCUMENTS D’URBANISME

Quelques précisions 

Les mesures transitoires ou une mutation rapide des documents d’urbanisme :

SRADDET :  si nécessaire, engagement d’une procédure de modification dans le délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la loi.

SCoT/PLU/carte com. : intégration des dispositions de la loi lors de leur première révision ou modification après l’intégration des objectifs par le SRADDET. Leur évolution doit entrer en vigueur dans un délai de 5 ans pour les SCoT et 6 ans pour les PLU et cartes com., à compter de la promulgation de la loi. Si le SRADDET n’est pas modifié, les documents évoluent par modification simplifiée dans le délai d’un an suivant la promulgation de la loi.

En cas de non-respect de ces délais, les ouvertures à l’urbanisation prévues par les SCoT sont suspendues. Pour les PLU et cartes com., aucune autorisation d’urbanisme ne pourra être délivrée dans les zones à urbaniser ou les secteurs des cartes com. où les constructions sont autorisées.

Les SCoT, PLU et carte com. qui ont été approuvés il y a moins de 10 ans, qui prévoient une réduction d’au moins un tiers de la consommation par rapport aux 10 années précédant l’arrêt du projet, disposent d’un délai de 10 ans à compter de la promulgation de la loi pour intégrer ses dispositions relatives au ZAN.

Ces dispositions sont applicables aux procédures en cours tant que le projet n’est pas arrêté et d’application immédiate aux documents approuvés.

Recodification de la partie réglementaire du livre Ier du code de la construction et de l’habitation : ce qui change

Comme suite à l’entrée en vigueur, le 1er juillet 2021, de l’ordonnance dite Essoc 2 du 29 janvier 2020, le livre Ier du code de la construction et de l’habitation (CCH) a fait l’objet d’une recodification (voir notre bulletin) et l’ordonnance dite Essoc 1 du 30 octobre 2018 a été abrogée. Parmi les mesures phares, les solutions d’effet équivalent (SEE) constituent une alternative aux solutions de référence réglementaires inscrites dans le CCH, et non une dérogation.

Dans son sillage, le décret n° 2021-872 du 30 juin 2021 recodifie à droit constant la partie réglementaire du livre Ier du CCH et fixe, en particulier, les conditions de mise en œuvre des SEE (I.) et les décrets nos 2021-821 et 2021-822 du 25 juin 2021 modifient le périmètre du diagnostic portant sur la gestion des produits, matériaux et des déchets issus de la démolition ou rénovation significative de bâtiments (II.).

I. LES CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE DES SOLUTIONS D’EFFET EQUIVALENT

Procédure

Les SEE recouvrent des domaines variés et autorisent la mise en œuvre de solutions alternatives à la réglementation selon la procédure codifiée suivante :

  • Le dossier de demande du MOA (contenu à R.112-2) est transmis à un organisme tiers et impartial (parmi ceux issus de l’art. R. 112-4) qui analyse le dossier (modalités à l’art. R. 112-3). Si la solution est valide, il produit l’attestation de respect des objectifs (art. R. 112-3 II.).
  • Si plusieurs SEE sont envisagées pour un même projet et entrent dans le champ de compétence de l’organisme tiers, un unique dossier commun peut être déposé et une seule attestation sera délivrée par l’organisme tiers (art. R. 112-1).
  • Le recours à une SEE impose que l’attestation soit obtenue avant le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme (art. L. 112-9).
  • Le vérificateur agréé contrôle cette SEE en amont et en cours d’exécution des travaux (modalités à l’art. R.112-5 I.).
  • S’il est décidé de ne pas mettre en œuvre la SEE durant les travaux, l’administration doit en être informée au plus tard dans un délai de 2 mois suivant l’achèvement (art. R.112-6).
  • La mise en œuvre de la SEE est confirmée par la délivrance de l’attestation de bonne mise en œuvre de la SEE par le vérificateur (art. R. 112-5 II.).

Compétence

Les organismes reconnus pour délivrer des attestations de respect des objectifs sont répartis en fonction des champs techniques1 ouverts à la SEE.

Concernant le champ technique relatif à la sécurité globale (Titre III), les organismes compétents sont le CSTB, Cerema et les contrôleurs techniques.

Concernant les champs techniques relevant des titres IV, V, VI et VII, le décret dispose que :

  • jusqu’au 31 décembre 2023 et dans le cadre d’une phase transitoire, cinq organismes (CSTB, Cerema, contrôleurs techniques, bureaux d’étude hautement qualifiés dans le domaine2 et enfin, laboratoires agrées en résistance au feu et désenfumage)  reconnus compétents sur un champ technique particulier pourront délivrer l’attestation de respect des objectifs correspondante ;
  • à partir du 1er janvier 2024, une seconde phase définitive impose que les organismes compétents soient accrédités, agréés ou encore certifiés, selon leur champ technique, pour attester du respect des objectifs par les SEE (art. R.112-4). Le ministre compétent devra publier les arrêtés qui fixeront les critères et procédures d’accréditation et de certification des organismes.

I. LES CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE DES SOLUTIONS D’EFFET EQUIVALENT

Opérations concernées

Le maître d’ouvrage d’une opération de démolition3 (art. R. 111-44 I.) et/ou de rénovation significative4 (art. R. 111-44 II.) est soumis à l’obligation de réaliser un diagnostic relatif à la gestion des produits, matériaux et déchets (PMD) lorsque :

  • soit, la surface cumulée de plancher5 de l’ensemble des bâtiments concernés est supérieure à 1 000 mètres-carrés ;
  • soit, le bâtiment concerné a accueilli « une activité agricole, industrielle ou commerciale et ayant été le siège d’une utilisation, d’un stockage, d’une fabrication ou d’une distribution d’une ou plusieurs substances classées comme dangereuses6 » (art. R. 111-43).

Le diagnostic PMD doit être réalisé avant le dépôt de l’autorisation d’urbanisme ou de l’autorisation d’aménager un ERP si l’opération y est soumise, ou préalablement à l’acceptation du devis ou à la passation du marché dans les autres cas (art. R. 111-45). Par ailleurs, il sera transmis au CSTB préalablement à l’acceptation du devis ou à la passation du marché (art. R. 111-50).

Contenu du diagnostic

S’agissant des produits, matériaux et équipements, le diagnostic PMD doit fournir (art. R. 111-46 II.) :

  • leur nature, leur quantité, leur localisation dans l’emprise et leur fonction dans l’opération ;
  • une estimation des déchets « potentiellement générés » par les PMD, avec leur classification7, et des déchets résiduels ;
  • une estimation de leur état de conservation ;
  • des indications et estimations quant aux possibilités de réemploi in situ, sur un autre site ou via des filières de réemploi ;
  • puis et à défaut de réemploi, les filières de gestion et de valorisation des déchets, notamment locales, en vue de leur réutilisation, recyclage, valorisation ou élimination ;
  • enfin, les indications ou précautions relatives à leur démolition, dépose, stockage et transport.

A l’issue des travaux, le maître d’ouvrage doit établir un formulaire de récolement (art. R. 111-49) qui sera transmis au CSTB dans les 90 jours suivant l’achèvement des travaux mentionnés à l’art.
R. 111-44 du CCH (art. R. 111-50).

Il est prévu que des arrêtés du ministre compétent viendront apporter de nombreuses et utiles précisions concernant le diagnostic PMD.

Quelques précisions

Titre III : Règles générales de sécurité

Titre IV: Sécurité des personnes contre les risques d’incendie

Titre V : Qualité sanitaire des bâtiments

Titre VI : Accessibilité des bâtiments

Titre VII : Performance énergétique et environnementale

Ils disposent d’une qualification du plus haut niveau d’expertise possible dans le domaine concerné par la SEE.

3 « une opération consistant à détruire une partie majoritaire de la structure d’un bâtiment ».

4 « une opération consistant à détruire ou remplacer au moins deux des éléments de second œuvre mentionnés ci-après, à la condition que les travaux concernés conduisent à détruire ou remplacer une partie majoritaire de chacun de ces éléments :

a) Planchers ne déterminant pas la résistance ou la rigidité de l’ouvrage ;

b) Cloisons extérieures ne déterminant pas la résistance ou la rigidité de l’ouvrage ;

c) Huisseries extérieures ;

d) Cloisons intérieures ;

e) Installations sanitaires et de plomberie ;

f) Installations électriques ;

g) Système de chauffage. »

5 Art. R. 111-22 du code de l’urbanisme.

Art. R. 4411-6 du code du travail.

Art. R. 541-7 du code de l’environnement.

Abréviations

CCH : Code de la construction et de l’Habitation

CSTB : Conseil Scientifique et Technique du Bâtiment

ERP : établissement recevant du public

MOA : maître d’ouvrage

PMD : produits, matériaux et déchets

SEE : solution d’effet équivalent

Permis de construire valant permis de démolir en site inscrit : gare au Cheval de Troie !

Le patrimoine français est riche de sites inscrits (pas moins de 239 pour la seule Ile-de-France, par exemple), de sorte que de nombreux projets immobiliers sont concernés par leur réglementation. En raison de la qualité de ces sites, les droits de l’urbanisme et du patrimoine architectural encadrent strictement les travaux s’y rapportant.


Alors que leur régime juridique apparaissait clair, le Conseil d’Etat a progressivement étendu les effets de l’avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France (ABF) émis sur le volet permis de démolir à l’ensemble de l’autorisation. Dès lors, des brèches sont apparues dans la sécurisation juridique de cette autorisation unique au détriment des porteurs de projet. Face aux écueils juridiques qui en procèdent, une approche stratégique lors du montage et du dépôt des autorisations d’urbanisme en site inscrit mérite d’être adoptée.

I. LE PERMIS DE CONSTRUIRE VALANT PERMIS DE DÉMOLIR EN SITE INSCRIT : ATTENTION AUX FAUX-SEMBLANTS

A. Un régime d’avis conforme en apparence restreint

Toute démolition, même partielle, d’une construction située en site inscrit doit être précédée d’un permis de démolir (art. R. 421-28 du code de l’urbanisme).

L’article L. 451-1 du code de l’urbanisme admet qu’une autorisation de démolir puisse être intégrée dans un permis de construire : une demande unique aboutira, après instruction, à la délivrance d’un arrêté de permis de construire valant permis de démolir.

Or, les procédures d’instruction et de délivrance des permis de construire et de démolir comportent de notables différences de régimes. En effet, si dans le cas général, un avis simple de l’ABF est requis en matière de construction, les démolitions en site inscrit requièrent un avis conforme (art. R.425-18 et R.425- 30 c. urb.). De surcroît, cet avis est réputé négatif en cas de silence gardé par l’ABF pendant plus de deux mois1. Par conséquent, si, en principe, une autorisation2 implicite naît à l’issue du délai d’instruction , à titre dérogatoire, l’article R.424-2 du code précité prévoit que le défaut de réponse dans le délai d’instruction d’une demande de démolition vaut décision implicite de refus3.

L’articulation de ces différents régimes, au sein d’une unique autorisation, a suscité un contentieux nourri.

 

B. Un régime d’avis conforme élargi par le Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat a tout d’abord dû déterminer si l’avis de l’ABF devait être regardé comme portant sur le volet démolition alors même qu’il ne le mentionnerait pas expressément.

En 20154, la Haute juridiction est ainsi venue dissiper l’ambiguïté textuelle et l’incertitude des juges du fond5 en résultant, en affirmant que l’avis de l’ABF « doit être regardé comme portant sur l’ensemble de l’opération projetée, sans qu’il soit nécessaire que cet avis mentionne expressément la démolition ». Autrement dit, dans un permis de construire (PC) valant permis de démolir en site inscrit, l’ABF émet un avis conforme sur l’ensemble de l’opération projetée.

Restait à clarifier les effets du silence gardé par l’administration sur une demande de PC supposant, au préalable, des démolitions en site inscrit.

Dans une décision du 20 janvier 2020 (n°421949), le Conseil d’Etat tranche cette question en affirmant que « le défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction vaut décision implicite de rejet ». Ainsi, le silence gardé par l’administration sur une demande de PC en site inscrit dont le dossier fait clairement apparaître des démolitions vaut refus implicite pour le tout.

II. SÉCURISER LES PROJETS EXIGE UN PEU DE STRATÉGIE

A. Cheval de Troie en site inscrit

Les porteurs de projets ont été d’autant plus troublés par l’application jurisprudentielle de l’article L. 451-1 du code de l’urbanisme que, préalablement, le Conseil d’Etat6 avait jugé que « si le permis de construire et le permis de démolir peuvent être accordés par une même décision, (…) ils constituent des actes distincts comportant des effets propres » afin d’annuler partiellement l’autorisation sur le seul volet construction.

Pourtant, les décisions précitées ont étendu la sévérité du régime de la démolition en site inscrit à l’intégralité de l’autorisation sans distinguer les deux volets la composant, impliquant que :

  • d’une part, l’avis conforme émis par l’ABF place l’administration en situation de compétence liée y compris sur le volet construction ;
  • d’autre part, l’avis conforme de l’ABF de même que la demande faite à l’autorité administrative3 sont réputés refusés en cas de silence gardé à l’expiration du délai d’instruction. Le régime du permis de démolir en site inscrit déteint ainsi sur l’ensemble de l’autorisation, y compris sur son volet construction.

Le régime du permis de démolir en site inscrit déteint ainsi sur l’ensemble de l’autorisation, y compris sur son volet construction.

B. Fragmenter pour mieux sécuriser

Au vu des conséquences pratiques défavorables du régime de cette autorisation unique, il est conseillé de déposer des demandes de permis distinctes en vue de maintenir les effets juridiques propres à chacune d’entre elles. En effet :

  • l’avis conforme de l’ABF ne concerne, par principe, que le permis de démolir, de sorte que l’autorité administrative pourra ne pas être en situation de compétence liée pour délivrer le permis de construire ;
  • une autorisation implicite de permis de construire pourra naître (sous réserve de l’application d’une autre législation), le risque du refus tacite étant cantonné au permis de démolir.

Le Conseil d’Etat juge toutefois que l’autorité administrative doit être en mesure d’apprécier la légalité du projet dans sa globalité lors de l’instruction7nonobstant les demandes distinctes de permis. Ainsi, en cas de fragmentation des demandes de permis de construire et de permis de démolir, il est conseillé soit de déposer de manière simultanée l’ensemble des demandes d’autorisations d’urbanisme, soit de déposer le permis de construire après la délivrance du permis de démolir.

Qu’est-ce qu’un site inscrit ?

Un site inscrit, tel que défini à l’article L. 341-1 du code de l’environnement, est un espace naturel ou bâti qui « présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général ». Les sites inscrits sont recensés au sein de chaque département.

Par exemple, selon la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie d’Île- de-France, cette région comporte 239 sites inscrits, pour une moyenne de 184 dans les autres régions.

Les sites inscrits représentent 13 % de la superficie de l’Île-de-France (contre 2,6 % de moyenne nationale). La ville de Paris, à elle seule, compte une superficie de sites inscrits de 4 400 hectares.

Quelques précisions

1 L’article R.423-67-2 du code de l’urbanisme dispose que « le délai à l’issue duquel l’architecte des Bâtiments de France doit se prononcer sur un permis de démolir situé dans un site inscrit est de deux mois. En cas de silence de l’architecte des Bâtiments de France à l’issue de ce délai, son accord est réputé refusé ».

2 Art. R. 424-1 du code de l’urbanisme.

3 L’article R. 424-2 du code de l’urbanisme prévoit les cas dans lesquels l’absence de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction vaut décision implicite de rejet.

4 CE, 16 mars 2015, Ville de Paris c. M. Sebag, n°380498.

5 Alors que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise avait jugé que le permis de construire « intègre une réponse formelle sur la partie démolition du projet » (9 avril 2012, n°1006492), le tribunal administratif de Bordeaux avait adopté la position inverse et exigeait un avis exprès de l’ABF sur le volet démolition (20 juin 2013, n°1102378).

6 CE, 21 févier 2018, SCI La Villa Mimosas, n°401043.

7 CE, 7 novembre 1973, n°85237 ; CE, 17 juillet 2009, Cne de Grenoble, n°301615.

Annulation totale du PLUi-H de Toulouse Métropole : une méthode mal calibrée pour calculer la consommation foncière conduit à faire tomber un document d’urbanisme couvrant un territoire de près de 800 000 habitants

Par jugements des 30 mars 2021 et 20 mai 2021 (req. n° 1902329), le plan local d’urbanisme intercommunal valant plan local de l’habitat de Toulouse Métropole (ci-après « PLUiH ») a été annulé dans son ensemble par le tribunal administratif de Toulouse, sans modulation dans le temps, en raison notamment de la méthode de calcul mise en œuvre pour apprécier la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (ci-après « NAF ») sur les dix années précédant son approbation, qui aurait conduit à la surestimer. Quant aux objectifs de consommation foncière prévus par le PADD, ils auraient été, d’une part, « mal calibrés » en raison de l’utilisation de données obsolètes et, d’autre part, insuffisamment justifiés. La métropole a annoncé qu’elle ferait appel de ces jugements, dont les motifs résonnent immanquablement avec l’actualité juridique puisque l’intégration de l’objectif de « zéro artificialisation nette » du territoire (ci-après « ZAN ») à l’horizon 2050 est en cours de débat devant le Parlement.

I. CALCUL ERRONÉ DE LA CONSOMMATION PASSÉE DES ESPACES NAF ET OBJECTIFS DE MODÉRATION BASÉS SUR DES DONNÉES OBSOLÈTES = ANNULATION TOTALE

Méthode de calcul : l’obligation de tenir compte des données les plus récentes relatives à la consommation foncière précédant l’approbation du PLUi

L’article L. 151-4 du c. de l’urb., dans sa version applicable au litige1, disposait que : 

« Le rapport de présentation analyse la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers au cours des dix années précédant l’approbation du plan. (…) Il justifie les objectifs chiffrés de modération de la consommation de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain compris dans le PADD au regard des objectifs de consommation de l’espace fixés, le cas échéant, par le SCoT et au regard des dynamiques économiques et démographiques ». 

A ce titre, sur la base de photographies satellitaires et aériennes inscrites dans le rapport de présentation du PLUi-H de Toulouse-Métropole, un ralentissement de la consommation d’espaces a été enregistré entre 2007 (181 ha/an) et 2013 (154 ha/an). 

Lors du diagnostic initial, et faute d’éléments d’information suffisants sur la consommation foncière entre 2014/2018, une projection sur cette période a été réalisée à partir des données de 2007/2013 pour satisfaire aux exigences de l’art. L. 151-4 du c. de l’urb. 

Certains requérants ont cependant reproché aux auteurs du PLUi-H de ne pas avoir ajusté la projection établie pour 2014/2018 à l’analyse de la consommation réalisée en 2016 dans le cadre de la révision du SCoT, dont les résultats auraient été publiés avant l’arrêt du projet du PLUi-H, alors même qu’elle faisait ressortir « une consommation moyenne inférieure de plus de 38% à celle qui avait été retenue pour l’extrapolation initiale ».

En dépit des difficultés auxquelles sont confrontés les auteurs de PLUi-H dans la collecte et le traitement des données relatives à la consommation foncière, le juge administratif a estimé que l’analyse du SCoT de 2016 aurait dû être prise en considération dans la version arrêtée du PLUi.

Surestimation de la consommation foncière : une méconnaissance du principe de modération de  consommation des sols

Pour aboutir à l’annulation du PLUi-H, le tribunal administratif de Toulouse a retenu les éléments suivants :

  • PADD : la modération de la consommation foncière sur le territoire à été fixée à 10 % par rapport à la consommation analysée sur la seule période observée (allant de 2007 à 2013), sans  prendre en compte les données récentes de la période 2014 à 2018, ni même le justifier. De plus, la méthode de calcul des besoins en foncier est fondée sur des indicateurs obsolètes et est insuffisamment expliquée ;
  • rapport de présentation : une insuffisance dans l’explication de la méthode utilisée pour  réaliser l’extrapolation de la consommation foncière estimée entre 2014 et 2018 sur le territoire, alors même que des données plus récentes et contradictoires étaient disponibles (considérant no 16 du jugement du 30 mars 2021) ;
  • compatibilité avec le SCoT : si le tribunal relève en première analyse que la consommation foncière retenue dans le PLUi-H apparaît compatible avec le SCOT, il considère en définitive que tel n’est pas le cas dès lors que les méthodes de calcul pour chacun des deux documents n’étaient pas les mêmes ;
  • comptabilisation des zones U : le PLU aurait dû comptabiliser les espaces libres en zone U dans les projections de consommation en sus des zones UA, ce qui n’a pas été fait.


A noter sur ce dernier point que le tribunal administratif de Toulouse indique que, sous réserve d’une cohérence avec les principes du code, « les auteurs des PLU disposent d’une certaine marge d’appréciation pour déterminer eux-mêmes les modalités de calcul de la consommation des espaces (…) ».


II. LE JUGE REFUSE UNE MODULATION DANS LE TEMPS DES EFFETS DE L’ANNULATION

Le refus d’une modulation dans le temps 

Après avoir jugé que ces vices n’étaient pas régularisables au sens de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé l’annulation totale du PLUi-H et décidé, dans un premier temps, de sursoir à statuer afin de permettre aux parties de débattre sur la question d’une éventuelle modulation des effets de l’annulation dans le temps2.

A la suite de ce sursis à statuer, dans un jugement du 20 mai 2021, le tribunal a refusé d’accorder cette modulation des effets de l’annulation dans le temps au motif que :

  • les territoires repassant sous POS et, à terme, sous RNU ne représentent que 10 % du territoire et 5 % de sa population ;
  • il n’est pas établi qu’un nombre excessif d’autorisations accordées et non encore devenues définitives seraient remises en cause par cette annulation, ni que la rétroactivité de l’annulation compromettrait ou retarderait un nombre important de projets en cours d’instruction ;
  • le maintien en vigueur du PLUi-H n’est pas de nature à garantir une consommation d’espaces moindre que le retour aux précédents documents d’urbanisme (la consommation projetée étant de 50 % supérieure à celle constatée sur les années 2013/2016).

Annulation rétroactive du PLUi-H et autorisations d’urbanisme

Dans l’attente de l’élaboration d’un nouveau document d’urbanisme, les documents d’urbanisme immédiatement antérieurs redeviennent applicables aux communes de la métropole conformément à l’article L. 600-12 du code de l’urbanisme.  

En ce qui concerne les autorisations délivrées sous l’empire du document annulé dans son ensemble, et dans l’hypothèse ou elles auraient été attaquées dans les délais en vigueur, leur légalité sera ainsi appréciée par le juge administratif au regard de l’ancien document d’urbanisme remis en vigueur (pour une analyse complète et détaillée de cette question, se reporter à l’avis du Conseil d’Etat du 2 octobre 2020 n° 436934 sur l’article L. 600-12-1 du code de l’urbanisme).

Aussi, dès lors qu’un nouveau débat aura lieu sur les orientations du PADD, les autorités compétentes pourront surseoir à statuer sur les demandes d’autorisations susceptibles de compromettre ou de rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan. 

Etapes clés de la procédure d’élaboration du PLUIH de Toulouse Métropole : 

  • Délibération prescrivant l’élaboration du PLUI-H,  9 avril 2015
  • Délibération arrêtant le projet de PLUi-H, 3 octobre 2017
  • Déroulement de l’enquête publique du 30 mars 2018 au 17 mai 2018
  • Délibération approuvant le PLUi-H du 11 avril 2019

L’ultime étape du principe de la modération de la consommation des espaces : le ZAN

  • Loi n° 2000-1202 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain : consécration de la gestion économe des sols ;
  • Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement : obligation d’analyser la consommation foncière sur les dix années précédant l’élaboration du PLU et outils de densification ;
  • Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové : analyse des capacités de densification et de renouvellement urbain dans le rapport de présentation des PLU ;
  • Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique : insertion de la notion de « lutte contre l’étalement urbain » dans l’article L. 101-2 du code de l’urbanisme ;
  • Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (travaux parlementaires en cours) : inscription dans la loi d’un objectif concret et contraignant d’absence de toute artificialisation nette des sols (ZAN) à l’horizon 2050.

1 Désormais, depuis la loi du 23 novembre 2018 (n° 2018-1021) entrée en vigueur le 25 novembre 2018, l’analyse de cette consommation doit se faire jusqu’à l’arrêt du document d’urbanisme et non plus jusqu’à son approbation.
 
2 Possibilité consacrée par la jurisprudence Association AC ! (CE, ass., 11 mai 2004, n° 255886). En effet, l’annulation rétroactive d’un document d’urbanisme peut emporter des « conséquences manifestement excessives »,  tant en raison des effets produits par l’acte que de l’intérêt général s’attachant à un maintien temporaire de ses effets.  

Pacte Dutreil : La doctrine administrative met fin à l’incertitude et exclut désormais les activités de location en meublé du dispositif Dutreil transmission

Le pacte Dutreil permet l’exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit pour la transmission d’entreprises individuelles (art 787 C du CGI) et de sociétés (art 787 B CGI) sous certaines conditions. Ce dispositif est ouvert aux activités commerciales, industrielles, libérales ou agricoles. L’éligibilité de l’activité de loueur en meublé, de nature hybride, avait été admise comme commerciale pour le bénéfice du Dutreil sur le fondement d’une interprétation doctrinale (via un renvoi à la doctrine en matière d’ISF). La suppression de l’ISF avait ouvert une période d’incertitude à laquelle a mis fin un changement de doctrine en date du 6 avril 2021 : l’activité de loueur en meublé n’est plus éligible au Dutreil

L’ancienne position de la doctrine admettait l’éligibilité des loueurs en meublé

L’article 787 B du CGI vise notamment, pour l’applicabilité de l’exonération partielle, les activités commerciales sans les définir expressément. Or, l’activité de loueur en meublé présente une nature hybride : elle est civile par nature, mais commerciale au sens fiscal (imposable en tant que « BIC » pour l’application de l’impôt sur le revenu selon l’article 35 I 5° bis du CGI).

L’ancienne doctrine administrative relative au Dutreil pour les sociétés prévoyait que la définition des activités éligibles était déterminée par référence aux dispositions doctrinales relatives à l’exonération des biens professionnels dans le cadre de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Or, cette doctrine administrative reconnaissait comme commerciales toutes les activités soumises au régime fiscal des « BIC », comprenant donc la location en meublé.

Ainsi, à la suite de l’avis du Comité de l’abus de droit fiscal du 6 novembre 2015, l’administration fiscale avait reconnu que le renvoi à la doctrine fiscale précitée relative à l’ISF permettait de se prévaloir de la nature commerciale au sens de l’article 787 B du CGI de l’activité de loueur en meublé à titre habituel – accompagnée ou non de prestation de services – la rendant ainsi éligible au pacte Dutreil.

La modification de la base BOFIP entraîne un revirement de position

A compter du 1er janvier 2018, l’ISF a laissé place à l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI). Il s’en est donc suivi une période d’incertitude s’agissant de la position de l’administration fiscale sur l’applicabilité du dispositif Dutreil à l’activité de location meublée. Dans un premier temps, en date du 11 octobre 2018, l’administration a retiré ses commentaires relatifs à l’ISF, ce qui rendait le renvoi de la doctrine administrative « Dutreil » sans objet et ouvrait une période d’insécurité juridique.

Elle a finalement procédé, le 6 avril 2021, à la modification de la documentation relative au pacte Dutreil. 

Le champ d’application de l’exonération s’agissant de l’activité éligible est désormais défini par renvoi aux règles applicables à l’IFI. Or l’article 966 du CGI, auquel l’administration se réfère dans son commentaire, indique que « n’est pas considérée comme une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale l’exercice par une société ou un organisme d’une activité de gestion de son propre patrimoine immobilier ».

Tirant les conséquences de ces dispositions, la nouvelle documentation administrative prévoit expressément l’exclusion du bénéfice du Dutreil « des activités de location de locaux meublés à usage d’habitation ».

La location meublée même professionnelle est désormais exclue du dispositif

L’administration fiscale, par cette modification de sa doctrine, opère donc une volte-face en revenant sur l’éligibilité au pacte Dutreil des sociétés et entreprises individuelles exerçant une activité de loueur en meublé à titre habituel.

De fait, même les « LMP » au sens de l’IR ou de l’IFI sont désormais exclus, – la doctrine, devant être appliquée littéralement, ne faisant aucune distinction entre le caractère professionnel ou non de l’activité – cette position nous ayant été confirmée par l’administration fiscale au sein d’une réponse à rescrit.

Reste néanmoins que l’adjonction d’une activité de prestation de services para-hôteliers à l’activité de location meublée, conférant à la location le caractère d’une activité commerciale par nature, continue d’être éligible à l’exonération partielle des droits de mutation dans le cadre du pacte Dutreil malgré la nouvelle position de l’administration fiscale.

La position de l’administration est opposable depuis le 6 avril 2021

Le changement de position de la doctrine administrative est immédiatement opposable aux contribuables  à compter du 6 avril 2021. Les commentaires administratifs étant en consultation jusqu’au 6 juin dernier, l’administration est en droit de procéder à une éventuelle révision ; cependant il semble peu probable qu’elle revienne sur ce point. Les transmissions avec Pacte Dutreil d’entreprises ou de sociétés (ex. SARL de famille) de location meublée ont donc aujourd’hui vécu. La mise à jour de la doctrine confirme néanmoins que les activités de marchands de biens, commerciales par nature, restent éligibles au Pacte Dutreil. Il en est de même pour la para hôtellerie.

En matière d’IFI, si l’activité de location en meublé n’est pas une activité commerciale conformément à l’article 966 du CGI, l’article 975 V du CGI prévoit néanmoins une exonération pour les biens loués meublés qui remplissent les conditions pour être considérés comme des actifs professionnels (plus de 23.000€ de recettes annuelles et bénéfice net représentant plus de 50% des ressources imposables du foyer).

Réécriture et recodification du code de la construction et de l’habitation : une réforme discrète mais efficace

Le gouvernement a été habilité par la loi pour un Etat au service d’une société de confiance du 10 août 2018, dite Essoc, à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi afin de faciliter la réalisation des projets de construction. 

L’ordonnance dite Essoc 1 du 30 octobre 2018, entrée en vigueur le 1er novembre 2018 et à vocation transitoire, avait pour ambition de faciliter la mise en œuvre de solutions alternatives au droit commun dans les projets de construction avec l’entrée en vigueur du permis de faire (voir notre bulletin) et l’instauration du permis d’expérimenter. L’ordonnance dite Essoc 2 du 29 janvier 2020 poursuit l’objectif de réécrire et recodifier le code de la construction et de l’habitation (ci-après CCH). Son entrée en vigueur, le 1er juillet 2021, entraînera l’abrogation de l’ordonnance dite Essoc 1 et aura des incidences de la phase de conception (avec les solutions d’effet équivalent) jusqu’à l’utilisation des logements (par le biais du carnet d’information du logement). 


I. RATIONALISATION DES TEXTES ET RESPONSABILISATION DES MAITRES D’OUVRAGE


Un CCH enfin allégé : simplification et rationalisation du droit ? 

L’ordonnance Essoc 2 relative à la réécriture des règles de construction recodifie le livre Ier du CCH. Elle poursuit la double ambition de le simplifier et de le clarifier. Le volume des règles se trouve ainsi réduit d’un quart et la partie législative divisée en quatre parties. 


La première partie porte sur les règles générales de construction et de rénovation ainsi que sur l’encadrement de la conception, de la réalisation, de l’exploitation et des mutations des bâtiments  (Titres I et II). 


La deuxième partie est relative à l’ensemble des règles de construction applicables dans les différents champs techniques du bâtiment (sécurité, sécurité des personnes contre les risques d’incendie, qualité sanitaire, accessibilité, performances énergétique et environnementale) avec, pour chacun, les objectifs généraux poursuivis (Titres III à VII). 


Cette partie intègre également les articles du code du travail relatifs à la sécurité sur les chantiers.


La troisième partie fixe les règles concernant le contrôle et les sanctions (Titre VIII). 


Enfin, la quatrième et dernière partie prévoit les dispositions particulières à l’Outre-mer (Titre IX). 

Le respect des objectifs généraux : une obligation de résultat pour le maître d’ouvrage

La réécriture et la recodification du CCH sont, avant tout, les marqueurs d’un changement de paradigme dans le droit de la construction. 


En effet, cette réforme prévoit une obligation de résultat pour le maître d’ouvrage en imposant aux constructeurs des dispositifs techniques précis et le respect des règles de l’art avec des performances à atteindre. Le nouvel article L. 112-4 du CCH dispose à cet effet que « toute solution technique peut être mise en œuvre dès lors qu’elle respecte les objectifs généraux prévus par la loi ». 


Ce sont les titres I et II qui définissent les objectifs généraux que le maître d’ouvrage devra respecter. Deux hypothèses sont à distinguer : 

  • soit la règle comporte des résultats minimaux, fixés par décret, pour chaque champ technique : le maître d’ouvrage devra alors prouver qu’il a atteint les objectifs en démontrant l’obtention de ces résultats minimaux (cf.1 – précisions). 
  • soit la règle ne comporte pas de résultats minimaux : le maître d’ouvrage devra alors justifier du respect des objectifs par le recours, soit à une solution de référence (prévue par décret), soit à une solution d’effet équivalent (SEE). 

II. DES INCIDENCES PRATIQUES DE LA CONCEPTION À L’UTILISATION DES LOGEMENTS


Ce que changent concrètement les solutions d’effet équivalent (SEE) pour la conception

Le nouvel article L. 112-6 du CCH définit la SEE comme « une solution technique par laquelle la justification du respect des objectifs généraux assignés dans un champ technique est apportée ». 


Si le maître d’ouvrage souhaite recourir à une SEE, il devra justifier que la solution retenue respecte les objectifs généraux et permet d’atteindre des résultats au moins équivalents à ceux de la solution de référence. Pour ce faire : 

  1. un organisme tiers indépendant devra évaluer la solution retenue et produire, le cas échéant, une attestation de respect des objectifs  (cf. 2 – précisions) ; 
  2. l’attestation devra être transmise au ministre chargé de la construction avant le démarrage des travaux ;
  3. un contrôleur technique vérifiera enfin que la mise en œuvre de la solution est conforme aux règles énoncées dans le dossier de demande d’attestation et délivrera, à la fin des travaux, une attestation de bonne mise en œuvre de la SEE

Les maires, préfets et le ministre se verront confier un pouvoir de police administrative visant à contrôler et sanctionner le respect de mise en œuvre des SEE pour les constructions en cours ou achevées. En cas de manquement, après mise en demeure, le maître d’ouvrage pourra être redevable d’une astreinte journalière au plus égale à 150 € et, parallèlement, condamné à payer une amende allant jusqu’à 1500 €, sur le fondement du nouvel article L. 182-2 du CCH. 

La création du CIL comme outil de suivi de la performance énergétique des logements 

Le projet de loi de ratification de l’ordonnance Essoc 2 prévoit d’instaurer un carnet d’information du logement (CIL)

Aux termes de l’article 12 du projet de loi, il s’agit d’un document permettant de connaître les caractéristiques du logement et les travaux antérieurs « dont la connaissance est indispensable à l’évaluation de la performance énergétique et à la programmation d’opérations de rénovation efficaces sur le bâti et les systèmes énergétiques » ; son entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2022. 

Le CIL vient succéder au carnet numérique d’informations, de suivi et d’entretien du logement prévu à l’article L. 111-10-5 du CCH, introduit par la loi ELAN, mais n’ayant jamais vu le jour en raison d’une présomption d’inconstitutionnalité soulevée par le Conseil d’État (avis CE, 23 juin 2020, n° 400172).

Le CIL sera établi par le propriétaire à l’issue de la construction ou des travaux de rénovation modifiant la performance énergétique du logement et devra être mis à jour régulièrement. Il sera transmis en cas de changement de propriétaire et pourra être dématérialisé. Le décret en Conseil d’État qui précisera ses modalités d’application pourrait utilement clarifier ses liens avec le diagnostic de performance énergétique d’ores et déjà requis en cas de vente ou location (cf. articles R. 134-1 et suivants du CCH).

Précisions 


1. L’article L. 111-1 du nouveau CCH définit le résultat minimum comme « le niveau qui doit être au moins atteint par le bâtiment ou un des éléments qui le constitue pour respecter un objectif général dans un champ technique de la construction au sens du présent article. Ce niveau est le plus souvent exprimé de façon quantifiée et peut prendre différentes formes telles celle d’un indice, d’une performance, d’un seuil ».

2. L’organisme chargé de délivrer l’attestation de SEE devra être « un organisme tiers au maître d’ouvrage offrant des garanties de compétence et d’indépendance  » (article L. 112-9 du nouveau CCH). Un décret en Conseil d’État viendra préciser, pour chaque domaine technique, les organismes pouvant délivrer cette attestation et les compétences requises pour l’exercice de cette activité. 

3. Le nouvel article L. 112-10-2 du CCH oblige les maîtres d’ouvrage à conserver tous les documents relatifs aux SEE pendant une durée de dix ans. 

4. Les articles 11, 17, 19 et 20 du projet de loi de ratification intègrent au CCH des dispositions introduites par la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (n° 2019-1428) et par la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (n° 2020-105). Sont ainsi codifiées, par exemple, les dispositions relatives au diagnostic concernant la gestion des produits, matériaux et déchets de certains chantiers, de même que des dispositions relatives à l’accès des PMR aux ERP ou installations ouvertes au public. 

Modification du régime des SEE entre Essoc 1 et Essoc 2 

L’attestation de SEE devait être transmise au ministre avant le dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme (Essoc 1).

À compter du 1er juillet 2021, lors de l’entrée en vigueur de la l’ordonnance Essoc 2, l’attestation de SEE devra être transmise avant le commencement des travaux.

Last but not least : le volet réglementaire

La recodification de la partie réglementaire du CCH correspondant au livre Ier est également prévue avant le 1er août 2021. Cela représente plus de 400 articles à réécrire.