fermer menu

Le conventionnement ANAH : un outil pouvant permettre de satisfaire aux obligations de création de logements sociaux

es PLU ou documents en tenant lieu prévoient désormais quasi-systématiquement sur certaines parties de leur territoire des servitudes de mixité sociale (art. L. 151-15 C. urb.), lesquelles conditionnent l’obtention d’autorisations d’urbanisme (PC ou DP) à la réalisation d’un pourcentage de « logements sociaux » mais sans pour autant toujours donner de définition précise de cette catégorie.
Outil trop souvent oublié dans le cadre de cette obligation, le conventionnement ANAH permet pourtant d’y satisfaire.

L’OBLIGATION DE CRÉATION DE LOGEMENTS SOCIAUX

La loi SRU

La loi dite « SRU » du 13 décembre 2000 a institué, pour les villes appartenant à certains territoires, des objectifs à atteindre concernant l’offre de logements sociaux afin de favoriser la mixité sociale et d’assurer une répartition du parc social sur l’intégralité du territoire.


Son article 55 a ainsi instauré un quota de 20% de logements sociaux, porté à 25% pour les villes se situant en zone tendue (loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013).

Un décret (décret n° 2019-1577 du 30 décembre 2019) a pour mention fixé la liste des communes exemptées de l’application de ces dispositions (codifiées à l’article L. 302-5 et s. du Code de la construction et de l’habitation et précisées par l’article R. 302-14 du même code)

Les dispositions du PLU

L’article L. 151-15 du code de l’urbanisme permet aux auteurs du PLU d’imposer, en cas de réalisation d’un programme de logement, « un pourcentage (…) affecté à des catégories de logements qu’il définit dans le respect des objectifs de mixité sociale ». 


Cette habilitation étant large, les PLU fixent plus ou moins précisément les catégories auxquelles doit être affectée cette quotité de logements. En effet, il peut être directement renvoyé aux catégories de logements conventionnés énumérées par le code de la construction et de l’habitation (LLS, PSLA, logements intermédiaires etc.) ou à la catégorie lato sensu des « logements sociaux », le cas échéant sur renvoi de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation.

Nb : lorsqu’il existe, le PLH ou le volet habitat du PLUi est censé définir assez précisément les typologies des logements aidés.

LE CONVENTIONNEMENT ANAH

Un outil éligible SRU et, le cas échéant, PLU

Les logements conventionnés avec l’ANAH peuvent être décomptés dans le cadre du calcul des quotas dits « SRU » (art. L. 831-1 du CCH sur renvoi de l’art. L. 302-5 du même code, qui renvoie lui-même aux « logements à usage locatif appartenant à d’autres bailleurs {i.e. bailleurs privés}, à condition que ceux-ci s’engagent à respecter les obligations précisées par des conventions régies par la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre III » soit les articles L. 321-8 à L. 321-12 du CCH).


Ne sont ainsi concernés que les conventionnements applicables au secteur locatif social (convention à loyer social ou très social conclue en application des articles L. 321-8 et D. 321-23 du CCH), à l’exclusion donc des conventionnements applicables au secteur locatif intermédiaire (convention à loyer intermédiaire conclue en application des articles L. 321-4 et D. 321-23 du CCH).


Ces conventionnements pourraient satisfaire mutatis mutandis aux exigences du PLU dès lors qu’il y serait notamment fait renvoi à l’article L. 302-5 précité du CCH.

Modalités de fonctionnement

La conclusion d’un conventionnement ANAH « social » ou « très social » implique le respect de plafonds de loyer par m2 différenciés selon la zone au sein de laquelle se trouve le logement, allant de 7,20 € en zone C à 12,19 € en zone A bis pour le conventionnement social et de respectivement 5,59 € à 9,49 € pour le conventionnement très social.

De même, des plafonds de ressources sont applicables selon la composition du ménage (nombre de personnes le composant), d’une part, et l’emplacement du logement (Paris et communes limitrophes, Île de France hors Paris et communes limitrophes, et autres régions), d’autre part.

Enfin, et sauf cas d’exclusion (cf. encart), un abattement fiscal peut être appliqué au montant brut des loyers perçus dans le cadre de ce conventionnement d’un montant de 70% en zone A bis, A et B1 et 50% en zone B2. Aucun abattement n’est en revanche applicable en zone C.

Une éligibilité SRU confirmée

Réponse ministérielle Quentin n° 6133 du 18/06/2019 (JOAN p. 5584) : « (les) communes ont la possibilité de recourir (…) au conventionnement du parc privé existant via l’agence nationale de l’habitat (Anah) (…). S’agissant enfin des logements sociaux entrant dans le décompte SRU, le Gouvernement rappelle qu’il est attaché à ce que le cœur de ce décompte soit constitué de logements locatifs sociaux pérennes, offrant dans la durée, au travers du conventionnement à l’aide personnalisée au logement (APL), toutes les garanties nécessaires à l’application d’un loyer bas adapté aux capacités contributives des ménages locataires sous plafond de ressources ».

Nota Bene

L’abattement fiscal sur les loyers bruts, applicable aux logements conventionnés avec l’ANAH, est applicable en cas de réalisation d’une opération sous le bénéfice du régime de droit commun des déficits fonciers ou bénéficiant de l’avantage fiscal « Malraux », mais est exclusif des opérations réalisées sous le bénéfice du régime de faveur applicable aux monuments historiques ou bénéficiant de l’avantage fiscal « Pinel ».

Dans quels cas une opération de construction et d’aménagement modifie-t-elle substantiellement le cadre de vie et emporte-t-elle une concertation préalable ?


L’article L. 103-2 du code de l’urbanisme impose à certains projets de construction ou d’aménagement une concertation obligatoire préalablement au dépôt de la demande de permis de construire ou d’aménager. En particulier, l’alinéa 3 de cet article prévoit que les projets qui sont susceptibles de modifier substantiellement le cadre de vie des habitants doivent faire l’objet d’une concertation préalable, notamment en raison de leurs incidences sur l’environnement et/ou l’activité économique. Le respect de cette obligation de concertation préalable est primordial : à défaut, le dossier de demande d’autorisation d’urbanisme sera incomplet, emportant un risque de demande de pièces (et donc, d’allongement des délais d’instruction), de refus, voire d’annulation contentieuse. En outre et depuis 2014, le code de l’urbanisme a ouvert la possibilité de soumettre d’autres projets à la procédure de concertation préalable, de manière plus ou moins facultative, de sorte que les autorisations d’urbanisme qui doivent en justifier sont plus nombreuses.


I. L’ARTICLE L. 103-2 AL. 3 DU CODE DE L’URBANISME PRÉVOIT LES CAS DANS LESQUELS LA CONCERTATION PRÉALABLE EST OBLIGATOIRE


Cas où le recours à la procédure de concertation préalable est obligatoire


L’article L. 103-2 al. 3. du C. Urb. impose d’associer les habitants, les associations locales ou toutes autres personnes concernées à l’élaboration de certains projets d’aménagement et de construction « ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ». 


Afin de préciser le champ d’application de la concertation préalable, l’article R. 103-1 du C. Urb. énumère limitativement les projets qui doivent obligatoirement y être soumis. Huit hypothèses sont limitativement identifiées, parmi lesquelles la transformation d’une voie existante en aire piétonne d’une superficie supérieure à 3000 m2 par exemple. 


Dans le cas où l’opération apparaît soumise à la procédure de concertation préalable, le demandeur d’autorisation d’urbanisme doit joindre au dossier déposé, en application de l’article R. 431-16 m) du C. Urb., le bilan de la concertation transmis par l’autorité compétente ainsi qu’un document expliquant les suites données à ce bilan.


Ce cadre restrictif apparaît donc permettre la sécurité juridique des opérations qui « entrent » ou « sortent » du champ d’application de l’article R. 103-1 du C. Urb. précité, ce qui n’empêche pas que la jurisprudence a été amenée à se prononcer sur l’appréciation de ces dispositions.

Le contrôle rigoureux du juge quant à l’obligation de recourir à la concertation

Le juge administratif contrôle in concreto la nécessité d’organiser une concertation préalable à la demande de permis et apprécie notamment l’ampleur de l’opération à l’échelle de la commune en prenant en compte les éléments suivants :


A l’appui de ces critères, le juge vérifie si le projet entre dans les hypothèses où une opération est soumise à concertation préalable obligatoire en application des articles L. 103-2 et R. 103-1 du C. Urb. 
Si le recours à la procédure de concertation préalable apparaît strictement encadré par les textes à certains types d’opérations, la loi ALUR de 2014 a ouvert la possibilité de recourir à la procédure de concertation préalable de manière spontanée et donc, facultative.

II. L’ARTICLE L. 300-2 AL. 1 ET 6 DU CODE DE L’URBANISME OUVRE LA POSSIBILITÉ DE RECOURIR SPONTANÉMENT (MAIS PAS SEULEMENT) À LA CONCERTATION PRÉALABLE

Le recours à la procédure de concertation préalable peut être facultatif…


Comme souligné dans notre bulletin du 11 avril 2016, l’article L. 300-2 al 1 du C. Urb. prévoit que les porteurs de projets peuvent, de leur propre initiative, soumettre à concertation préalable les opérations de construction ou d’aménagement qui seraient situées sur un territoire couvert par un SCoT, un PLU ou une carte communale, qui ne relèveraient pas de l’article R. 103-1 précité et qui seraient susceptibles d’avoir une incidence sur le cadre de vie


Dans cette hypothèse, les porteurs de projets et, le plus souvent, les collectivités concernées, estiment de leur propre chef, qu’une participation du public préalable au dépôt et à la délivrance de l’autorisation d’urbanisme apparaît nécessaire. 


Par ailleurs, ce choix permet aux projets devant faire l’objet d’une évaluation environnementale de n’être soumis qu’à une procédure de mise à disposition du public.


Bien qu’il ne faille pas obérer le caractère persuasif de l’administration dans le recours à de telles concertations « facultatives », ces dispositions apportent néanmoins une dimension spontanée à la procédure de concertation préalable et peuvent, dans certains cas, faciliter l’adhésion du public à un projet d’ampleur par sa participation et donc, sa compréhension des enjeux (1).

… sauf lorsque l’autorité administrative a décidé de l’imposer par voie réglementaire.

L’article L. 300-2 al 6 du C. Urb. prévoit que l’autorité compétente pour statuer sur une demande de permis de construire ou d’aménager peut définir parmi les projets de travaux ou d’aménagements mentionnés par cet article, ceux qui sont soumis à concertation préalable (2).


Pour les projets concernés (désignés par décision ou délibération), la concertation préalable au dépôt de l’autorisation d’urbanisme passe alors de facultative à obligatoire. 


Ce pouvoir est toutefois encadré. Le préfet, la commune ou l’EPCI compétent pour apprécier les travaux ou aménagements – autre que ceux faisant l’objet d’une concertation obligatoire – qui seront soumis à concertation préalable, doivent motiver leur décision par la prise en compte de leur importance, leur impact potentiel sur l’aménagement de la commune ou la sensibilité du lieu où ils seront implantés.


Il est donc nécessaire, lors de l’élaboration des projets de construction ou d’aménagement, de vérifier si une concertation préalable, hors les cas prévus à l’article L. 103-2 précité, doit néanmoins être réalisée au regard de la décision règlementaire adoptée par l’autorité compétente.


Exemples

Il a été jugé que sont soumis à concertation préalable les projets : 

  • de construction de deux immeubles qui,  eu égard à l’augmentation de la population du quartier, à la création de nouveaux locaux commerciaux sur une surface de 770 m2 qu’il va entraîner ainsi que les changements dans les conditions de circulation des piétons et des véhicules et de stationnement qu’il va occasionner au sein de la commune du Cap d’Ail (4594 hab. en 2017), modifie de manière substantielle les conditions de vie dans le quartier (CAA de Marseille, 17 juin 2004, n° 99MA01941).
  • de création, dans le cadre d’une opération de rénovation urbaine, d’une place piétonne à l’emplacement d’un ancien carrefour dans la commune de Grande-Synthe (22 966 hab. en 2017) (CAA Douai, 5 avril 2012, n° 11DA00250).

A contrario, il a été jugé que ne sont pas soumis à concertation préalable :

  • la construction sur une parcelle de moins d’un hectare de 7 000 m2 de logements dans une commune moyenne dotée d’une forte densité telle que Juvisy-sur-Orge (16 667 hab. en 2017) (CE, 20 décembre 2000, n° 210219).
  • la construction sur le territoire de la commune de Saint-Ouen (51 108 hab. en 2017) d’un ensemble immobilier d’une surface de plancher de 58 028 m2, alors que la commune était dotée d’un PLU (TA Montreuil, 25 juin 2019, n° 1800461).
  • la transformation partielle d’une place, à usage de parking, en aire piétonne, alors même que sa superficie était supérieure à 3000 m2 (CAA Nantes, 28 février 2020, n° 19NT00935).

Rappels

(1) En ce cas, les porteurs de projet doivent justifier des mêmes pièces que pour une concertation préalable obligatoire lors du dépôt de la demande de permis.

(2) Cet acte présente un caractère règle-mentaire et peut donc être contesté par la voie de l’exception à l’occasion d’un recours contre la décision de l’autorité compétente imposant une concertation sur son fondement. 

Le sort du sursis à statuer opposé en cours de modification d’un document d’urbanisme enfin tranché

Le Conseil d’Etat, dans sa décision Société Denali Consulting et autres, du 28 janvier 2021 (n° 433619) tranche enfin la question du champ d’application du sursis à statuer et de la possibilité de prononcer une telle décision en cours de modification d’un plan local d’urbanisme. La jurisprudence ambivalente (bien que non fichée sur ce point) à cet égard avait semé le trouble alors qu’une interprétation littérale des textes devait conduire à exclure la possibilité pour une autorité administrative de surseoir à statuer alors qu’une simple procédure de modification était engagée. Les règles sont désormais claires : le SAS en cours d’élaboration ou de révision d’un PLU : oui (I.), le SAS en cours de modification d’un PLU : non (II.).  

I. LE SURSIS À STATUER EN COURS D’ÉLABORATION OU DE RÉVISION D’UN PLU : OUI

La possibilité ouverte de surseoir à statuer en cours d’élaboration et de révision d’un PLU

Le sursis à statuer est une mesure de sauvegarde permettant de différer la décision de l’autorité compétente sur une demande d’autorisation d’urbanisme.

Les articles L. 424-1 et L. 153-11 du code de l’urbanisme prévoient ainsi que le maire peut surseoir à statuer sur toute demande d’autorisation concernant des travaux, constructions ou installations, au cours d’une procédure d’élaboration et de révision d’un PLU à deux conditions :

  • le projet est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreux l’exécution du futur plan ;
  • le débat sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durable (PADD) a déjà eu lieu.

Cette décision ne peut excéder une durée de deux ans. A l’issue de ce délai, le pétitionnaire peut confirmer sa demande, dans un délai de 2 mois suivant l’expiration du délai. Dans cette hypothèse, l’autorité compétente peut soit prononcer un nouveau sursis d’un an maximum, fondé nécessairement sur un autre motif que celui du sursis initial, soit délivrer l’autorisation d’urbanisme dans un délai de deux mois (art. L. 424-1 C. urb.).

La condition objective de débat sur les orientations du PADD

Avant la loi n° 2017-86 Égalité et citoyenneté du 27 janvier 2017, l’autorité compétente pouvait surseoir à statuer dès la publication de la délibération prescrivant l’élaboration ou la révision d’un PLU (art. L. 123-6 C. urb.).

Elle devait toutefois vérifier que l’état du projet était suffisamment avancé pour que la décision de sursis puisse être opposée. Ce critère soumis à interprétation a donné lieu à une jurisprudence fournie

Par exemple, le Conseil d’Etat a pu considérer qu’un PADD et un projet de règlement rendus publics et comportant des cartes détaillées du zonage pouvaient permettre de regarder le projet de PLU comme suffisamment avancé (CE, 30 mai 2011, n° 327769).

En fixant une limite temporelle et objective (débat sur les orientations générales du PADD), la loi n° 2017-86 a tenté d’éteindre les incertitudes pesant sur la légalité d’une décision de sursis à statuer.

Le seul débat sur les orientations du PADD, parfois prématuré, ne suffit toutefois pas à établir un projet assez consistant pour permettre de fonder un sursis à statuer (voir par ex CAA Marseille, 18 décembre 2020, n° 18MA05002).

II. LE SURSIS À STATUER EN COURS DE MODIFICATION D’UN PLU : NON

Un sort jusqu‘alors incertain pour le sursis à statuer en cas de modification d‘un PLU

La loi du 27 janvier 2017 n’avait pas éteint toutes les interrogations. 

La lecture littérale de la loi permettait de supposer que devait être de facto exclue la possibilité de surseoir à statuer lorsqu’une procédure de modification du PLU était en cours. En effet, aucun débat sur les orientations du PADD ne saurait avoir lieu dans le cadre d’une « simple » modification d’un PLU (art. L. 153-36 et suiv. C. urb.). Il en va d’ailleurs de même s’agissant de l’ancien article L. 123-6 dès lors que la modification d’un PLU n’est pas prescrite par délibération.

Toutefois, une décision Danglot de décembre 2017 avait semé le doute.

Bien que la décision n’était pas fichée sur ce point, le Conseil d’Etat avait alors considéré comme légal un sursis à statuer prononcé en cours de modification d’un PLU, eu égard à son degré d’avancement, la modification devant être approuvée dans les semaines suivant la décision de sursis à statuer (CE, 18 décembre 2017, n° 380438).

L’exclusion par le CE de la modification d’un PLU du champ d’application du sursis à statuer

Le Conseil d’Etat a mis fin à cette incertitude dans une décision mentionnée aux tables du recueil Lebon, dans laquelle il a « rectifié le tir », pour reprendre les termes du rapporteur public, par rapport à la décision Danglot précitée. 

Le Conseil d’Etat distingue ainsi la procédure de modification de la procédure d’élaboration (à laquelle peut en revanche être rattachée la procédure de révision) et exclut la première du champ d’application du sursis à statuer : 

« l’existence d’une simple procédure de modification d’un document d’urbanisme en cours n’autorisait pas le maire à faire usage de la procédure de sursis à statuer ».

Cette décision a été prise dans une affaire où l’ancien article L. 123-6 du code de l’urbanisme était applicable. Il n’est toutefois pas à douter qu’une telle solution devrait être étendue au nouvel article L. 153-11 du code de l’urbanisme, dont la lecture littérale permet tout autant d’exclure la possibilité de surseoir à statuer en cours de modification d’un PLU.

Quelques précisions

Les conclusions du rapporteur public

Selon le rapporteur public dans ses conclusions sous la décision commentée, la solution simplificatrice tendant à harmoniser le régime du sursis à statuer en cours de modification, de révision et d’élaboration d’un PLU, se serait heurtée à l’intention du législateur, à la logique des textes et à la compréhension qu’en a la doctrine :

  • l’instauration d’un sursis à statuer par le législateur est justifiée par la nécessité de préserver le contenu des documents en cours d’évolution, notamment en raison de la lourdeur et la longueur des procédures, ce qui ne saurait être le cas s’agissant des modifications de PLU ;
  • une lecture littérale des textes (L. 123-6 et L. 153-11 C. urb.) permet d’exclure la procédure de modification des hypothèses de sursis à statuer ;
  • la doctrine administrative (Rép. Min. n° 3696, JO Sénat 19 avril 2018, p. 1920), praticienne et universitaire a analysé les textes dans le sens d’une exclusion de la modification.

Abréviations

C. urb. : code de l’urbanisme

Réduction d’impôt Pinel : Reconduction mais abaissement progressif des taux en 2023 et 2024

L’article 168 de la loi de finances pour 2021 du 29 décembre 2020 (n° 2020-1721) a reconduit le dispositif Pinel jusqu’en 2024. 

Les taux de la réduction d’impôt sont cependant abaissés progressivement en 2023 et 2024 en vue d’un éventuel remplacement du dispositif. 

Par exception, certains logements continueront de bénéficier des taux actuels de la réduction d’impôt. 

DIMINUTION PROGRESSIVE DES TAUX DE LA RÉDUCTION D’IMPÔT PINEL EN 2023 ET 2024


La réduction d’impôt « Pinel » est prorogée pour les acquisitions réalisées jusqu’au 31 décembre 2024, mais les taux applicables, fixés en fonction de la durée de l’engagement de location du contribuable, sont abaissés à partir de 2023 et 2024 en fonction de la date d’acquisition* :

Exemple : Pour un immeuble acquis en 2022 avec un engagement de location de 9 ans, le taux applicable sera de 18%, soit 2% par an, pour se terminer en 2031. 

Pour un immeuble acquis en 2023, le taux sera de  15%, soit environ 1,7% par an pour se terminer en 2032.


 
* Par exception, pour les logements que le contribuable fait construire, c’est la date de dépôt du permis de construire qui détermine le taux applicable. 

LES TAUX ACTUELS MAINTENUS POUR LES OPÉRATIONS LES PLUS « VERTUEUSES »


Les taux de réduction d’impôt seront maintenus à leur niveau actuel, même pour les opérations réalisées en 2023 et 2024, qui portent sur :

  • des logements situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (liste consultable ici : sig.ville.gouv.fr/atlas/QP) ; ou
  • des logements qui respectent un niveau de qualité de performance énergétique et environnementale, supérieure à la réglementation actuelle.

MAISONS INDIVIDUELLES ET BÂTIMENTS D’HABITATION COLLECTIFS

Pour rappel l’article 161 de la loi n°2019-1479 du 28 décembre 2019 a supprimé la possibilité de bénéficier du dispositif Pinel pour les maisons individuelles acquises neuves ou par le biais d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement. L’article 169 de la loi de finances pour 2021 précise que cette disposition est également applicable aux maisons individuelles que le contribuable fait construire. 

Néanmoins il est toujours possible de bénéficier du Pinel concernant une maison individuelle mais uniquement en cas de réhabilitation, transformation ou de la réalisation de travaux conduisant à la production d’un immeuble neuf. 

A noter

Le gouvernement souhaite remplacer le dispositif Pinel par un dispositif plus efficient. Dans cette optique, il doit remettre au Parlement, avant le 30 mars 2021, un rapport proposant des nouveaux dispositifs de soutien au développement de l’offre de logements locatifs intermédiaires en favorisant une implication accrue des investisseurs institutionnels.  

Dispositif Denormandie inchangé

Les investissements relevant du dispositif « Denormandie » (acquisitions de logements faisant l’objet de travaux d’amélioration ou de transformation situés dans des communes ayant un besoin marqué de réhabilitation de l’habitat en centre-ville ou ayant conclu une convention d’opération de revitalisation du territoire) sont expressément exclus du champ d’application des présentes mesures.

Expropriation – Impossibilité de renoncer au droit de rétrocession (non acquis)

Dans une décision n° 20-19.351 du 19 janvier 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a précisé les modalités de mise en œuvre du droit de rétrocession. Elle a ainsi jugé que l’expropriant ne peut pas, en amont, demander au propriétaire exproprié de renoncer à son droit de rétrocession dans l’hypothèse où l’opération d’expropriation ne serait pas réalisée.
Cette jurisprudence condamne donc avec fermeté la pratique tendant à faire signer à l’exproprié une clause de renonciation à son droit de rétrocession concomitamment au versement des indemnités d’expropriation par acte notarié.

La Cour a donc réaffirmé la protection du droit de rétrocession des expropriés (I.) tout en précisant les modalités dans lesquelles il reste possible d’y renoncer (II.)

I. LA PROTECTION DU DROIT DE RÉTROCESSION 

La définition du droit de rétrocession

L’article L. 421-1 du code de l’expropriation dispose que :

« Si les immeubles expropriés n’ont pas reçu, dans le délai de cinq ans à compter de l’ordonnance d’expropriation, la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l’ordonnance d’expropriation, à moins que ne soit requise une nouvelle déclaration d’utilité publique. »

Cet article permet aux propriétaires expropriés, dans les cas où l’opération d’expropriation ne serait finalement pas réalisée, et ce même après leur indemnisation et leur départ, de se voir rétrocéder leur bien.

La nullité des clauses de renonciation par anticipation

Par un arrêt du 19 janvier 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation juge que « l’exproprié peut renoncer au droit de rétrocession, qui relève de l’ordre public de protection, une fois celui-ci acquis ».

Ainsi le droit de rétrocession relève de l’ordre public et, conformément à la jurisprudence constante en la matière (1), « nul ne peut valablement renoncer à un droit d’ordre public avant qu’il ne soit acquis ».

Dès lors, toute clause qui aurait pour effet de faire renoncer l’exproprié à son droit de rétrocession, alors que celui-ci n’est pas encore né, sera considérée comme nulle.

II. QUAND PEUT-ON RENONCER À SON DROIT DE RÉTROCESSION ? 

Après un délai 5 ans (destination non conforme à la DUP)

La Cour énonce que le droit de rétrocession est acquis « 5 ans après l’ordonnance d’expropriation si les biens n’ont pas reçu la destination prévue par la déclaration d’utilité publique ou ont cessé de recevoir cette destination ».

Il s’agit du cas où l’exproprié constate, à l’issue de ce délai, que le projet envisagé par la DUP n’a pas été mis en œuvre par l’expropriant, ou bien qu’il a été réalisé dans ce délai mais que la destination des biens expropriés a, depuis, été modifiée et ne correspond plus au projet prévu par la DUP.

L’expropriant ne dispose que de 5 ans pour réaliser un projet conforme à celui déclaré d’utilité publique. Une fois ce délai expiré, l’exproprié peut demander la rétrocession de son bien s’il s’avère que le projet est, en l’état, non conforme à la déclaration d’utilité publique.

La Cour estime alors que son droit de rétrocession est né et qu’il peut ainsi valablement y renoncer à compter de cette date.

Avant l’expiration du délai de 5 ans (incompatibilité avec le projet prévu par la DUP)

La Cour rappelle qu’il existe une seconde hypothèse ouvrant le droit de rétrocession : « avant même l’expiration du délai de 5 ans, si le projet réalisé est incompatible avec celui déclaré d’utilité publique ».

Le droit de rétrocession est acquis avant l’expiration du délai de 5 ans prévu par la loi dans le cas où le projet serait réalisé dans ce délai mais serait incompatible avec celui ayant justifié la déclaration d’utilité publique. L’exproprié pourrait, alors, dans cette hypothèse être susceptible de faire valoir son droit à rétrocession. Il sera donc également en mesure d’y renoncer. La Cour avait déjà admis cette possibilité et n’effectue ici qu’un rappel. (4)

Si la personne publique décide de mettre en vente le bien exproprié, elle doit informer en priorité l’exproprié de sa décision de vendre, et l’inviter à opter entre l’exercice immédiat du droit de rétrocession ou la renonciation à ce droit.L’exproprié a 2 mois pour faire connaître son acceptation et proposer un prix de vente. S’il n’y a pas d’accord sur le prix de vente, la personne publique doit saisir le juge de l’expropriation.

Quelques précisions

(1) Voir notamment : Civ 2e, 25 mars 1991, n°89-21 ; 3e Civ., 27 octobre 1975, n° 74-11.656  

(2)  Civ. 3e, 26 mars 2014, n° 13-13.670

(3)  Civ. 3e, 18 avril 2019, n° 18-11.414

(4) Civ. 3e, 19 février 1992, n° 90-12.652

Point de vigilance 

Droit de rétrocession et droit au délaissement

Il est constant que l’exercice du droit de délaissement, constituant une réquisition d’achat à l’initiative du propriétaire du bien, ne permet pas au cédant de solliciter la rétrocession de ce bien sur le fondement de l’article L. 421-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, même lorsque le juge de l’expropriation a donné acte aux parties de leur accord sur la fixation du prix et ordonné le transfert de propriété au profit de la collectivité publique. (2)

Par ailleurs, un propriétaire qui a fait usage du droit de délaissement ne pourra bénéficier ensuite de son droit à rétrocession. Il pourra seulement obtenir une indemnisation en cas d’atteinte au droit au respect des biens, notamment lorsque la commune vend ledit bien à un prix nettement supérieur au prix d’achat. (3)

Abréviations

Civ. Chambre civile de la Cour de cassation

DUP Déclaration d’utilité publique

Publication du décret relatif à l’évaluation environnementale des projets ou l’introduction de la « clause-filet » : les projets de moins de 10 000 m² désormais concernés !

Publié le 26 mars 2022 et applicable aux déclarations et demandes d’autorisations déposées dès le 27 mars 2022, le décret n° 2022-422 du 25 mars 2022 relatif à l’évaluation environnementale des projets instaure un nouveau dispositif afin de soumettre certains projets situés en deçà des seuils fixés à l’annexe de l’article R. 122-2 du code de l’environnement, à la réalisation d’une évaluation environnementale. Ce décret fait suite à l’annulation par le Conseil d’État du décret n° 2018-435 du 4 juin 2018 en tant qu’il ne prévoyait pas d’autres critères que la dimension des projets pour soumettre ces derniers à évaluation environnementale. L’introduction de la « clause-filet » vient donc pallier l’inconformité du droit français à la directive européenne 2011/92/UE du 13 décembre 2011 qui impose de prendre en compte la localisation des projets et leurs impacts. Bien que ce nouveau dispositif suscite certaines interrogations (I), nous tenterons de proposer une illustration de l’application de cette clause-filet à un projet immobilier soumis à une déclaration au titre de la loi sur l’eau (II).

I. MODE D’EMPLOI (PARTIEL) DU NOUVEAU DISPOSITIF POUR LES PROJETS SITUÉS EN DEÇÀ DES SEUILS FIXÉS A L’ANNEXE DE L’ARTICLE R. 122-2 DU CODE DE L’ENVIRONNEMENT

Cliquer ici pour voir le schéma.

II. ILLUSTRATION : NOUVEAU PROJET IMMOBILIER DE 7 000 M2  DE SURFACE DE PLANCHER OU D’EMPRISE AU SOL SOUMIS À DÉCLARATION « LOI SUR L’EAU » (PAR EX : RUBRIQUES 2.1.5.0, 1.1.1.0).

Dans notre cas, le projet est situé en-deçà des seuils fixés à l’annexe de l’article R. 122-2 du code de l’environnement

(cf. rubrique 39. Travaux, constructions et opérations d’aménagement).

Cliquer ici pour voir le schéma.

Précisions

1 Lorsque le projet nécessite plusieurs autorisations relevant de législations indépendantes, seule la première autorité saisie de la première demande se prononcera dans les 15 jours sur la nécessité ou non de saisir l’autorité en charge de l’examen au cas par cas.

Afin d’assurer la coordination des différentes autorités amenées à se prononcer sur un volet du projet, le décret impose au pétitionnaire de mentionner les déclarations et autorisations déjà déposées, la date du dépôt et l’autorité compétente.

2 Il s’agit des critères énumérés à l’annexe III de la directive 2011/92/ UE du 13 décembre 2011 (caractéristiques, localisation, impacts du projet).

3 Le décret se borne à indiquer que le délai de 15 jours dont dispose l’autorité saisie court à compter du dépôt de dossier de demande. Il apparaît toutefois vraisemblable que ce dossier doit présenter un caractère complet. Cette précision a d’ailleurs été faite dans les nouvelles dispositions relatives à la procédure d’autorisation de défrichement (article 5 du décret). 

4 L’hypothèse la plus stricte voudrait que le silence de l’administration vaille obligation pour le pétitionnaire de déposer un dossier de demande d’examen au cas par cas. Néanmoins, en l’absence de précisions en ce sens par le décret, et compte tenu de la rédaction de l’article R. 122-2-1 (II) c. env., ce silence pourrait seulement emporter la reprise de l’instruction.

5 L’article R.122-3 c. env. auquel le décret renvoie ne précise pas le délai dont dispose le maître d’ouvrage pour saisir l’autorité en charge de l’examen au cas par cas.

Fiscalité immobilière post-Brexit : résidents britanniques, à vos réclamations !

Un an après, les conséquences fiscales du Brexit ne sont pas encore tout à fait arrêtées. En sortant de l’Union européenne le 1er janvier 2021, le Royaume-Uni est devenu un État tiers à l’Union Européenne et n’entrait plus, à ce titre, dans le champ de l’exonération des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Néanmoins, par une mise à jour de sa documentation informative, la direction générale des finances publiques (DGFiP) prévoit la possibilité de maintenir l’exonération de CSG/CRDS pour les britanniques à trois conditions.

Les prélèvements sociaux des non-résidents

Pour rappel (cf. notre précédent bulletin sur le sujet), le régime des prélèvements sociaux afférents aux revenus du patrimoine (revenus locatifs, plus-values immobilières…) applicable aux non-résidents fiscaux dépend du pays au sein duquel ces personnes sont affiliées à un régime de sécurité sociale :​

  • Soit le non-résident fiscal est affilié à un régime de sécurité sociale d’un Etat membre de l’UE, de l’EEE, de la Suisse ou d’un Etat ayant conclu avec la France une convention bilatérale de sécurité sociale : il est alors exonéré de CSG et de CRDS mais reste soumis au prélèvement de solidarité au taux de 7,5 % (CGI, art. 235 ter).​​
  • Soit le non-résident fiscal n’est pas affilié à un régime de sécurité sociale dans l’un des Etats susvisés : il est alors assujetti aux prélèvements sociaux au taux global de 17,2 % dans les mêmes conditions qu’un résident fiscal français.​

Le changement de paradigme lié au Brexit

L’exonération de la CSG/CRDS est prévue au profit des ressortissants des États parties au règlement (CE) n°883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, en raison du principe européen d’unicité du régime de protection sociale des ressortissants des Etats membres. En sortant de l’Union européenne, le Royaume-Uni n’était plus, de facto, partie à ce règlement.​

Par conséquent nombre de commentateurs avaient logiquement considéré que les ressortissants britanniques qui procédaient à des ventes immobilières en France post Brexit n’entraient plus dans le champ d’application de l’exonération de prélèvements sociaux. ​

A partir de cette date, la pratique a donc consisté à assujettir aux prélèvements sociaux au taux global de 17,2 % les plus-values immobilières de source française.

Une exonération finalement maintenue à trois conditions​

Le 14 janvier 2022, la DGFiP a publié un document intitulé « Liste de questions/réponses à destination des particuliers », relatif aux conséquences fiscales du Brexit. ​

L’administration fiscale confirme l’analyse selon laquelle les ressortissants britanniques ne sont plus, en principe, concernés par les exonérations de prélèvements sociaux. ​

Néanmoins, cette exonération est maintenue pour les revenus du patrimoine des contribuables qui respectent les trois conditions suivantes :​

  • être affiliés à la sécurité sociale britannique ;​
  • être ressortissants ou résidants légaux de France, du Royaume-Uni ou d’un autre État membre de l’Union européenne ;​
  • ne pas être à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français.  ​

L’administration fiscale précise toutefois que les ressortissants britanniques concernés demeurent en tout état de cause assujettis au prélèvement de solidarité de 7,5 %. ​

Une incitation à corriger les impositions indues au titre de l’année 2021

L’administration fiscale incite les contribuables ayant indûment payés 17,2 % de prélèvements sociaux sur leurs plus-values immobilières à solliciter leur restitution dans les délais de réclamation contentieuse de droit commun. ​

Les demandes de restitution, qui doivent intervenir par voie de réclamation contentieuse, peuvent être introduites jusqu’au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle du paiement de l’impôt.​

S’agissant de prélèvements sociaux payés à tort sur des plus-values en 2021 par exemple, les contribuables ont jusqu’au 31 décembre 2023 pour réclamer.​

Les revenus fonciers 2021 qui n’ont pas encore été déclarés et donc non encore imposés ne sont pas concernés par ces réclamations. Il conviendra de vérifier qu’ils ne soient pas soumis à CSG/CRDS au titre de l’impôt sur le revenu 2021.​

La portée concrète de cette position

Le document informatif visant les « prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine », le maintien de l’exonération de CSG/CRDS s’applique, pour les résidents britanniques, aux :​

  • plus-values immobilières ;​
  • revenus fonciers ;​
  • revenus tirés de location meublée ;​
  • et plus généralement à tous les « revenus d’immeubles sis en France ou de droits relatifs à ces immeubles ». ​

Pour tous ces revenus, seul le prélèvement de solidarité de 7,5 % reste applicable. ​

Les résidents britanniques restent tenus à la représentation fiscale

Par principe, les ressortissants étrangers réalisant des plus-values en France sont tenus de désigner un représentant fiscal responsable du bon déroulement de l’imposition des plus-values en France (CGI, art. 244 bis A). ​

Par exception, les ressortissants de pays membres de l’UE ou de l’EEE (sous certaines conditions) sont dispensés de cette obligation. ​

Le Royaume-Uni ne faisant plus partie ni de l’UE, ni de l’EEE, ses ressortissants sont donc tenus de désigner un représentant fiscal à l’occasion des plus-values réalisées en France. 

Détermination de la plus-value imposable dans la rénovation immobilière

Les dépenses permettant de majorer le prix d’acquisition, et donc de réduire le montant de la plus-value imposable, sont limitativement énumérées par l’article 150 VB du CGI mais dépendent également du régime fiscal choisi à l’occasion de l’opération de restauration immobilière.

LES DÉPENSES DE TRAVAUX MAJORANT LE PRIX D’ACQUISITION

Le prix d’acquisition doit être majoré des frais notariés, des éventuelles commissions d’intermédiaires, des droits d’enregistrement et de certaines dépenses de travaux, à savoir les dépenses d’amélioration et les dépenses de (re)construction, d’agrandissement ou de démolition, sous réserve qu’elles n’aient pas déjà été déduites de l’assiette de l’impôt sur le revenu ou du revenu global ou été incluses dans la base d’une réduction ou d’un crédit d’impôt (article 150 VB II 4°du CGI).

Les dépenses d’entretien et de réparation sont, quant à elles, exclues des dépenses pouvant être prises en compte pour le calcul de la plus-value.

PLUS-VALUE ET NATURE JURIDIQUE DE L’OPÉRATION

Que l’opération soit effectuée dans le cadre d’une VIR (article 150 VB I du CGI) ou d’une ASL (et de manière générale, pour toute vente en l’état avec réalisation de travaux par l’acquéreur), les modalités de majoration du prix d’acquisition pour le calcul de la plus-value immobilière restent les mêmes.

Ainsi, tant en VIR qu’en ASL, les dépenses de travaux qui sont déduites de l’assiette de l’impôt ou incluses dans la base d’une réduction ou d’un crédit d’impôt ne peuvent venir majorer également le prix d’acquisition de l’immeuble.

C’est aussi le cas des opérations pour lesquelles la doctrine fiscale est revenue sur sa position dans une réponse ministérielle en date du 10 janvier 2019. Désormais, même pour les opérations « Malraux » réalisées en VIR, les dépenses de travaux incluses dans la réduction d’impôt ne peuvent plus venir majorer le prix d’acquisition pour réduire le montant de plus-value imposable. Il reste toutefois possible de contester la position de l’administration fiscale relative à la VIR dès lors que la rédaction de l’article 150 VB I du CGI n’a pas été modifiée (cf. bulletin du 5 mars 2019).

PLUS-VALUE ET RÉGIME FISCAL DE L’OPÉRATION

Comme indiqué, le contribuable ne peut en principe inclure les dépenses de travaux déjà comprises dans la base d’une réduction d’impôt afin de majorer le prix d’acquisition pour le calcul de la plus-value immobilière quelle que soit la nature de l’opération, en VIR ou en ASL.

Il existe néanmoins une différence fondamentale entre le régime « Pinel » et le régime « Malraux ».

En effet, afin de ne pas pénaliser les contribuables qui investissent dans l’ancien, une mesure de tempérament bénéficie aux régimes fiscaux qui sont ouverts tant aux acquisitions de logements anciens qu’aux acquisitions de logements neufs ou en l’état futur d’achèvement, tel que le régime Pinel (BOI-RFPI-PVI-20-10-20-265). Ainsi dans le  « Pinel ancien » comme dans le « Pinel neuf », il est possible de venir majorer le prix d’acquisition des dépenses de travaux déjà comprises dans la réduction d’impôt et ce, tant dans les opérations en VIR qu’en ASL.

Il serait opportun de questionner l’administration fiscale sur la possibilité d’étendre cette mesure de tempérament aux opérations réalisées en « Denormandie » dès lors que certaines d’entre elles peuvent aboutir à la livraison d’un immeuble neuf.

A l’inverse, l’administration fiscale en écarte totalement le régime fiscal « Malraux » puisque circonscrit aux seules acquisitions de bâtiments anciens.

La majoration forfaitaire du prix d’acquisition

Au lieu de majorer son prix d’acquisition des dépenses de travaux pour leur montant réel, le contribuable peut opter pour une majoration forfaitaire de 15% de ce prix s’il cède son bien plus de 5 ans après son acquisition sans qu’il y ait lieu de rechercher si les dépenses de travaux ont déjà été déduites de l’assiette de l’impôt ou même simplement réalisées.

Précisions concernant l’imposition de la plus-value immobilière

La plus-value est imposable au titre de l’IR (au taux de 19%) ainsi qu’au titre des prélèvements sociaux (au taux de 17,2%), soit une imposition totale au taux de 36,2%.

Précisions sur les abattements pour durée de détention

Concernant l’IR :

  • De la 1e année à la 5e : aucun
  • De la 6e à la 21e inclue : 6% par an
  • 22e année révolue : 4%
  • Au-delà : exonération

Concernant les prélèvements sociaux :

  • De la 1e année à la 5e : aucun
  • De la 6e à la 21e inclue : 1,65% par an
  • 22e  année : 1,6%
  • De la 22e à la 30e : 9% par an
  • Au-delà : exonération

Dirigeant de société : comment anticiper sa succession ?

La transmission des titres d’une société peut être largement anticipée, tant sur le plan juridique (donation, donation-partage, réserve d’usufruit…) que sur le plan fiscal (notamment par la conclusion d’un pacte Dutreil). Mais la succession à la tête de la société mérite également d’être anticipée bien avant la transmission : elle seule peut garantir la continuité de l’exploitation, notamment en cas de décès prématuré du dirigeant.

Plusieurs mécanismes peuvent être envisagés, certains relevant du droit civil, d’autres du droit des sociétés, le choix devant être guidé, au cas par cas, selon les enjeux en cause, tant professionnels que familiaux.

METTRE EN PLACE UN MANDAT A EFFET POSTHUME

Prévu par les articles 812 et suivants du Code civil, le mandat à effet posthume permet de donner à une ou plusieurs personnes (physiques ou morales) le pouvoir d’administrer ou de gérer tout ou partie de sa succession, pour le compte et dans l’intérêt d’un ou plusieurs héritiers nommément désignés.

Reçu obligatoirement en la forme authentique, ce mandat a une durée de cinq ans (qui peut être prorogée) s’il est motivé par « un intérêt sérieux et légitime », notamment l’inaptitude ou l’âge des héritiers, ou la nécessité de gérer des biens professionnels.

Si la succession comporte des titres de société, le mandataire aura qualité pour voter en assemblée générale, voire se désigner dirigeant. Toutefois, si en règle générale, le mandataire peut exercer les actes d’administration, il n’en est pas de même pour les actes de disposition (à moins qu’ils ne soient nécessaires à la conservation ou la valorisation du patrimoine successoral).

Par ailleurs, le caractère temporaire du mandat, son ouverture limitée mais également la complexité de sa mise en place (concurrence avec l’exécuteur testamentaire) en font un outil imparfait.

CONSTITUER UNE HOLDING FAMILIALE

Le recours à une holding familiale permet de conforter la position de l’un des héritiers en tant que successeur dans la direction de la société, sans avoir à transmettre par avance les titres à l’ensemble des héritiers.

Soit, par exemple, le cas d’une société, dont le capital est divisé en 1000 actions détenues par une personne X, qui a trois enfants ; l’un d’eux (que l’on appellera Z) a vocation à lui succéder comme dirigeant. Si rien n’est fait, les titres de la société seront transmis à égalité entre les enfants et le successeur sera minoritaire (333 actions).

La constitution d’une holding familiale permettra  de bénéficier d’un effet de levier juridique et d’éviter cet écueil :

  • X donne 160 actions à Z ;
  • Constitution d’une société holding, Z apporte les 160 actions reçues, X apporte 240 actions. Z est désigné mandataire social (cf. ci-après).

 Au décès de X :

  • Dans la holding, chaque héritier recevra 80 actions ; Z disposera donc de 160 + 80 = 240 actions.
  • Dans la filiale, la holding détiendra 400 actions et les héritiers 200 actions chacun.

Dans la mesure où il contrôle la holding, Z détient donc, directement ou indirectement, la majorité des droits de vote dans la filiale (400 + 200) et est assuré d’y conserver le pouvoir.

DESIGNER PAR AVANCE SON SUCCESSEUR

Si le droit des sociétés ne connaît pas de mécanisme général permettant de désigner par avance la personne qui succèdera au mandataire social à son décès, plusieurs options sont ouvertes, qui dépendent avant tout de la forme de la société.

S’agissant d’une société civile, la cogérance est admise, tout comme la désignation d’une personne morale (holding familiale) en qualité de gérant.

Si la société est une SARL, la désignation d’un gérant suppléant n’est pas admise, ni celle d’une personne morale. En revanche, il est possible de désigner une cogérance, soit en organisant les pouvoirs entre cogérants (mais la limitation des pouvoirs ne serait pas opposable aux tiers), soit en repoussant dans le temps la prise d’effet des fonctions de l’un d’eux (par exemple au décès ou à l’incapacité de l’autre). La modification devra être publiée au RCS à la date de sa prise de fonction (Avis CCRCS n° 2012-010 du 23 mars 2012).

Si la société est une SAS, il n’est pas possible de désigner une co-présidence, mais a été admise la désignation, par voies statutaire ou assemblée générale :

  • d’un suppléant, qui sera amené à exercer la présidence en cas de décès ou d’empêchement de l’actuel président, jusqu’au terme du mandat de celui-ci ;

d’un successeur, qui deviendra de plein droit président au décès de son prédécesseur.

Pacte Dutreil : l’encadrement des fonctions de direction

Lorsque la transmission de la société bénéficie du régime du Pacte Dutreil (cf nos précédents bulletins), l’exercice des fonctions de direction est restreint.

Avant la transmission, la direction de la société (gérant de SARL, président de société par action…) doit être exercée par l’un des signataires de l’engagement collectif de conservation.

Après la transmission, la direction de la société peut être exercée :

  • Soit par l’un des signataires de l’engagement collectif de conservation,
  • Soit par l’un des bénéficiaires de la transmission qui a souscrit un engagement individuel de conservation.

Des modalités spécifiques sont prévues, par exemple au cas où l’engagement collectif n’a pas été souscrit, ou lorsque la direction de la société est exercée par une personne morale.

Que faire ?

Afin d’anticiper sa succession, il convient :

  • de bien identifier la personne qui sera susceptible d’occuper les fonctions de dirigeant,
  • de vérifier et, le cas échéant, modifier les clauses statutaires relatives, tant à la désignation du successeur qu’à la répartition des pouvoirs (notamment en cas de démembrement des titres).

Expatriation : anticiper l’exit tax

Face aux changements de domicile entre Etats, si les Etats adoptent des mesures fiscales de nature à encourager les nouveaux arrivants, ils ont également le souci d’éviter les expatriations dictées par le seul motif d’éluder l’impôt.

L’ « Exit tax », prévue à l’article 167 bis du Code général des impôts poursuit cet objectif : son régime et ses conséquences doivent être anticipés bien en amont de l’expatriation.

QUI EST CONCERNÉ PAR L’EXIT TAX ?

Les contribuables qui ont été domiciliés en France pendant au moins 6 des 10 dernières années sont imposables lors du transfert de leur domicile hors de France sur :

  • Les plus-values latentes liées soit à une participation représentant au moins 50 % du capital d’une société, soit un portefeuille de titres, droits sociaux et autres droits financiers dont la valeur excède 800.000 € ;
  • Les créances représentatives d’un complément de prix (clause d’indexation du prix des titres cédés sur les résultats futurs de la société) ;

En outre, les plus-values en report d’imposition (notamment au titre de l’art. 150-O B Ter du CGI) sont également imposables, sans condition de durée de résidence en France du contribuable.

Depuis le 1er janvier 2018, ces plus-values et créances sont imposables :

  • Soit au taux forfaitaire de 12,8 % (PFU),
  • Soit sur option globale du contribuable, au barème progressif de l’impôt sur le revenu (moyennant quelques retraitements prévus par le texte).

Elles sont également soumises aux prélèvements sociaux en vigueur lors du transfert du domicile fiscal hors de France.

COMMENT AVOIR DROIT AU SURSIS DE PAIEMENT

En cas de sursis de paiement, l’impôt n’est pas payé à l’occasion du transfert du domicile hors de France, mais à l’occasion d’évènements ultérieurs (cf. ci-dessous). Ce sursis est de droit ou optionnel selon les situations :

• Sursis de droit et sans prise de garanties lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État (hors Etats non coopératifs) ayant conclu avec la France une convention de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ;

• Dans les autres cas, le sursis est  subordonné au respect des conditions suivantes :

– Demande expresse déposée au service des impôts des non-résidents via le formulaire 2074-ETD, dans les 90 jours précédant le transfert

– Constitution de garanties (caution bancaire, hypothèque…) égales au montant de l’impôt en sursis

– Désignation d’un représentant fiscal (organisme accrédité, banque…) en charge des formalités  déclaratives.

JUSQU’À QUAND COURT LE SURSIS DE PAIEMENT

Le sursis de paiement court, soit jusqu’à certains évènements qui rendent l’impôt exigible, soit jusqu’au dégrèvement

Evènements rendant l’impôt exigible •Pour les plus-values latentes : cession à titre onéreux, rachat, remboursement ou annulation des titres ;•Pour les créances de complément de prix : perception du complément de prix, apport ou cession de la créance ou donation de la créance lorsque le donateur est fiscalement domicilié dans un ETNC ou un État ou territoire tiers à l’UE n’ayant pas conclu les conventions (sauf si cette donation n’a pas été faite dans un but principalement fiscal) ;•Pour les plus-values placées précédemment en report d’imposition : cession à titre onéreux (hors opérations d’échange ou d’apport), rachat, remboursement, annulation des titres reçus lors de l’échange ou de l’apport à l’origine du report ;•Non-respect des obligations déclaratives (cf ci-contre).Evènements ouvrant droit à dégrèvement •Décès du contribuable ;•Retour en France du contribuable ;•Transmission à titre gratuit des valeurs mobilières ;•A l’issue d’un délai de conservation de :-2 ans lorsque la valeur des titres entrant dans le champ de « l’exit tax » est inférieure à 2.570.000 € ; -5 ans dans le cas contraire.  NB : si le contribuable n’a pas bénéficié du sursis de paiement, ces évènements ouvrent droit à restitution de l’impôt payé.

Quand le transfert de domicile fiscal est-il effectif ?

Le transfert de domicile fiscal hors de France intervient donc :

  • lorsque le contribuable n’a plus son domicile fiscal en France en vertu de l’article 4 B du CGI ;
  • ou lorsque le contribuable a transféré son domicile ou sa résidence fiscale, au sens de la convention fiscale internationale qui lie la France à l’État de destination.

Selon l’article 4 B du CGI, est considéré comme ayant son domicile  en France le contribuable qui y a :

  • Son foyer (lieu de résidence de la famille) ou, à titre subsidiaire, le lieu de séjour principal (il y réside plus de 183 jours par an),
  • Son activité professionnelle principale (attention, les dirigeants de grosses entreprises sont soumis à des critères spécifiques)
  • Le centre de ses intérêts économiques (principaux investis-sements, source de la majeure partie des revenus etc.)

Quelles obligations déclaratives ?

A compter de son expatriation, le contribuable relève de la compétence du SIP non-résidents. Deux déclarations doivent être déposées :

  • L’année du transfert du domicile fiscal hors de France : déclaration n°2074-ETD 
  • Au titre de chacune des années suivantes, jusqu’à exigibilité de l’impôt ou dégrèvement :  déclaration n°2074-ETS, destinée à assurer le suivi de l’imposition.

Le montant global des droits en sursis de paiement doit en outre être reporté sur la déclaration 2042 C (case 8TN).